everything you touch surely dies

Ça faisait quelques semaines depuis le départ de Jude, de sa petite poupée parfaite qui sent la vanille et le citron. Et il ne savait plus quoi faire de sa peau, le pauvre Lieutenant. Il était assis dans son salon, quand son cellulaire a sonné; l’afficheur marquait Russ, un nom qu’il n’avait pas vu s’afficher depuis plusieurs mois. Eddie Russo? Qu’est-ce que son ancien partenaire du FBI pouvait bien lui vouloir un jeudi après-midi? Soit quelqu’un était mort, soit quelque chose de gros venait de se produire. Dans tous les cas, c’était préférable qu’il réponde. Putain qu'il n'aurait pas du répondre. « C’est urgent, Buck. » que son ami lui avait dit. « Faudrait que tu sois à Quantico demain matin au plus tard. » Sans lui donner plus d'explications. Alors il a pris le premier vol vers la Virginie. Quand il est arrivé aux bureaux de Quantico, dans son ancienne salle de conférence, une équipe y était déjà. Les murs et les tableaux étaient placardés de photos de victimes, de personnes disparues, de photos de scènes de crimes qu’il connaissait que trop bien.

Et au centre, la photo d’un homme qu’il aurait préféré ne jamais revoir. « Sam Barth est à nouveau actif, Buck. » qu’Eddie lui avait dit en s’approchant de lui. Le sang avait tourné dans les veines du vieux Robert. Samuel Barth était à la tête d’un ring de prostitution à Chicago, et Robert avait été sous couverture dans son organisation pendant plusieurs mois pour essayer de l’arrêter. Ils avaient réussi à le faire sans briser la couverture de l’ancien agent, et Barth avait passé plus d’une décennie en prison, mais était sorti l’an dernier sur une technicalité. Et il avait presque immédiatement repris ses activités illégales. À l’époque, Robert avait fait partie de son entourage proche, dans l’équipe de sécurité, mais là, Russo lui disait qu’il avait essayé de le contacter pour s’occuper de sa sa sécurité immédiate, parce qu’il ne faisait plus confiance à personne. « Re-bienvenue au FBI, Agent Buchanan. » C’était qu’une figure de style, parce qu’il l’avait jamais réellement perdu son statut d’agent; il donnait même à l’occasion quelques cours à l’Académie de Quantico, quand on avait besoin de lui. Mais officiellement, S.A.C Robert Buchanan reprenait du service. En moins de 24 heures, il avaient avisé Klamath Falls PD de la situation, la famille immédiate de Robert et il était en route pour Chicago. Sa couverture était qu’il devait assurer un training d’Agents de terrain sur une unité spéciale et qu’il ne pourrait pas avoir beaucoup de contacts. Ils avaient pris son téléphone trop rapidement, et la seule chose qu’il aurait réellement voulu faire, il n’a pas pu. Il n’a pas pu dire à sa petite poupée qu’il s’en allait, et qu'il ne savait pas quand il allait revenir.


" Y'a l'soleil qui était à peine sorti ce matin quand j'suis passé devant une pâtisserie. Ça sentait toi, bébé. Peut-être qu’ils venaient juste de faire cuire des cupcakes au citron? -"

" Partout où j'vais, ça sent comme toi, bébé. T'es dans mon âme, pour toujours. Tu l'saura jamais, mais c'est toi qui me garde en vie. -"

" J'ai fait des trucs pas nets, bébé. J'suis fait comme un roc, tu l'sais. Mais aujourd'hui, ça m'a fait vomir. C'est le genre de trucs dont j'te parlerai jamais, parce que j'voudrais pas que tu vois c'te côté là de moi. C'est pas beau, bébé. Mais si un jour j'peux te serrer dans mes bras encore, et foutre mes narines dans tes cheveux, j'sais que j'vais être capable d'oublier c'que j'ai fait aujourd'hui, pendant quelques minutes. -"

" C’est horrible ici, bébé. J’suis rendu trop vieux pour ces merdes de job sous couverture. Tout ce que j’voudrais, c’est être à nouveau sur le trottoir froid de Klamath, avec la neige qui nous tombe dessus, quand tout ce que j’connaissais de toi c’était ton prénom. J’le savais, dès que j’ai posé mes yeux sur toi ce jour là, que ma vie venait de changer. J’aurais dû te le dire. -"

" J'espère que t'es heureuse, bébé. C'est tout c'que j'veux pour toi. J'veux que tu passes tes journées à rire aux éclats, avec tes cheveux dans le vent et ta robe bleue comme le ciel qui rebondit au même rythme que tes pas. J'espère que tu manges plein de croissants, et que tu sors tard la nuit. J'espère qu'il y a quelque part un luc, ou un simon qui te drague, parce qu'il le voit lui aussi, qu'y en a pas deux comme toi. Je l'envie, le salopard. Parce qu'il te vois, heureuse, sous l'éclairage des lampadaires des ruelles de paris. -"

" Y’a une petite blonde, maintenant. Elle me fait tellement penser à toi, bébé. Putain que j’ai envie de la protéger. Plus que les autres, parce qu’elle me fait trop penser à toi. Elle a plus la lueur, dans ces yeux, celle que toi t’a encore… J’espère que j’vais être capable de la protéger, de la sortir d’ici avant que ce soit trop tard pour elle. -"

" Ma Jude, tu me manques tellement. -"


Trente-trois, c’est le nombre de messages consécutifs qu’il trouvait sous le nom de Jude. Tous reçus pendant son absence, alors qu’il n’avait pas accès à son téléphone. Progressivement plus tristes, certains fâchés contre lui, de son manque de réponse. Des insultes, des réaction de plus en plus fortes. Puis des excuses. Et de nouvelles insultes.

Jusqu’à ce qu’elle abandonne.


Elle était de retour, sa Jude. Il l’avait entendu avant de la voir; son cœur avait fait un bond. Elle était avec une de ses amies. Une blonde, qu’il avait l’impression d’avoir déjà vu avant. Il avait failli aller la voir, mais quelque chose l’avait retenu. Par chance parce que, ce qu’il avait entendu ensuite… elle voyait quelqu’un. Sa Jude voyait quelqu’un. Et elle avait l’air heureuse. Le vieux sentait ses doigts se resserrer, et il aurait pu frapper le mur près de lui quand elle avait commencé à expliquer comment le jeune homme s’y était pris avec elle. Alors il a préféré cesser d’écouter, et il avait quitté l’endroit. Son vieux cœur ne pouvait pas en prendre plus.

Elle avait mis un peu de baume sur son âme, pendant un moment. Lui avait fait oublier le gris de sa vie. Elle l’avait aidé, sans le savoir, alors qu’elle n’était même pas avec lui. Mais il était temps de passer à autre chose. C’était mieux comme ça, pour elle.