Un autre monde

@Kei Tamamori

Le téléphone portable vibra dans la poche arrière d’Alexander alors que l’appareil dédié aux appels professionnels reposait sur le coin de son bureau. Il prit néanmoins le temps de finaliser son courriel et d’appuyer sur le bouton d’envoi. Le blond plongea sa main dans la poche de son pantalon pour en extirper le cellulaire. Une simple pression que l’écran et celui-ci révéla alors un message S.O.S. de la part de Kei. L’alerte étant lancée, le futur dirigeant savait ce qui l’attendait. Seulement en répondant à son ami du pays du soleil levant, il fut pris de court lorsqu’il lui annonça qu’il s’agissait d’une urgence pour ce soir même.
Alex fouilla rapidement dans ses pensées, mais il n’y trouva aucune obligation après son devoir du moment, donc de terminer ses suivis de la journée. La chance était du côté de Kei. L’américain allait répondre présent, mais ne se gêna guère pour se moquer du directeur au passage -même si le tout restait amicale et sans rancune-.
Depuis que leurs chemins s’étaient croisés à l’une de ses soirées éternellement barbifiantes, l’un comme l’autre ne manquèrent jamais l’occasion de requérir la présence du second pour éviter de porter seul le fardeau de se mêler à ces vieux. Et qui refuserait d’avoir à ses côtés un individu de sa tranche d’âge au lieu de ceux dont les années d’existence accumulées les rapprochaient plutôt de la tombe?
Alex mentionna de bien lui allouer une heure ou deux avant de se présenter chez Kei. Il jugea que dans ce temps imparti, il parviendrait à rentrer chez lui, filer sous la douche et se préparer convenablement pour le type de soirée qui l’attendait. C’est en enjambant sa moto, après avoir enfilé son casque, qu’il se mit en route vers son ami, profitant du fait que les températures se réchauffaient peu à peu pour goûter à nouveau au plaisir d’arpenter les routes avec son véhicule à deux roues.

Arrivé à sa première destination, il se gara et se présenta à la luxueuse porte d’entrée du penthouse. Il désenfila son casque -le décoiffant brièvement, mais il aura bien l’occasion de s’arranger une toute dernière fois avant de partir officiellement-.
Une fois la sonnerie qui retentit, ce n’est qu’une question de secondes avant que la porte s’ouvre sur le japonais. Tel un sourire contagieux, les lèvres d’Alex s'élargissaient sur son visage. Il rentra, patienta que son hôte referme la porte et vint lui faire une accolade avant de se débarrasser de son manteau en cuire -dévoilant l’ensemble de l’habit traditionnel du costard-.

- À la longue, il faudra un petit temple de vénération à mon effigie chez toi, plaisanta-t-il afin d’amplifier son rôle de sauveur.

Kei savait qu’il pourra toujours compter sur lui pour ces soirées lassantes. Et même plus! Jamais l’aîné Walsh ne laissait une personne dans l’agonie, encore moins un ami!
Il saisit du peu de temps qu’il avait pour s’assurer que ses mèches de cheveux étaient à nouveau bien en place, aucun pli gênant dans ses vêtements. Une fois bien prêt, l’heure fatidique retentit et ce fut par le biais du chauffeur du directeur qu’ils convergèrent jusqu’à leur destination finale. Grande respiration comme si le fossoyeur les attendait de l’autre côté de la porte.

- Que du plaisir en perspective…!

Sarcasme, certes. Mais en ayant la compagnie de l’autre, ils arriveraient bien à casser cette ennuie et à profiter un minimum de la soirée -même si les heures risquaient d’être longues une fois à l’intérieur-.
L’accueil fut brève, devant s’annoncer, Kei n’eut aucun problème, cependant Alexander se heurta à une certaine réticence. Réticence qui s'envola dès qu’il mentionna le nom de son paternel. Sincèrement, ça le dépassait ce faux principe de prestige. Si le nom que tu portais ne répondait pas à leur critère de sélection, l’accès t’était aussitôt interdit… te refusant à ce monde hautain.
Une fois affranchi de cette étape -avouons-le, des plus inutile-, Alex se tourna vers son ami.

- Espérons que l’alcool soit au meilleur! Tu as beaucoup de vieux à brosser dans le sens du poil ce soir?

Un autre monde

@Kei Tamamori

Que lui mette en place un temple pour honorer sa magnificence Kei? Les moyens ainsi que l’espace ne posaient guère de problème. Seulement, le jeune Walsh souhaitait préserver l’égo de son ami un minimum. Quelle serait la prochaine requête si Alexander flanchait devant celle-ci? Bien que l’idée que chacun d’eux aient leur sphère de gloire chez la résidence de l’autre l’amusait.
Le japonais marqua un point, Alex adorait partager son ennui en sa compagnie lorsque ces soirées étaient inscrites à l’encre rouge dans son agenda. Et le plaisir étant partagé entre les deux, même si la ratio penchait davantage d’un côté que de l’autre… le plus vieux ayant encore le privilège de s’en sauver. Mais depuis que Kei kidnappait sa personne, ses apparitions se multipliaient malgré lui. À de nombreuses reprises, cette information se rendait jusqu’aux oreilles de son paternel qui était plus que ravi d’entendre que son fils se présentait sans même qu’il y soit convoqué. Comme s’il démontrait un intérêt particulier envers ces soirées, alors que la réalité était tout autre. Ça lui procurait un avantage néanmoins. Autant il parvenait à passer une agréable soirée avec son ami originaire du Japon, autant la réputation de sa famille en bénéficiait de ces actes de présence. Situation gagnante-gagnante. Ce dernier point primait au-dessus de tout pour sa famille et ça… Alexander l’avait vite compris et à ses propres dépens.
Mais cette proposition inattendue enjoua l’américain. En y pensant, ça ne serait pas si mal de rester ici pour la nuit. Ils pourront donc profiter de cette soirée comme il se le doit, n’ayant pas à conduire pour rentrer à sa petite villa.

- J’accepte ton invitation! dit-il, le sourire aux lèvres.

Arrivés à cette soirée à laquelle les deux jeunes hommes devaient faire valoir leur existence. Kei enchaîna sur les dires du blond -tout en s’amusant à souligner que bientôt, ça sera aussi sa réalité quotidienne-. Alex haussa les épaules tout en ajustant la cravate à son cou.

- Tu dois bien regretter d’avoir mis les pieds dans ce pays maintenant! Il est beau le rêve américain, non?

Les connaissances du caucasien sur la culture japonaise -ou asiatique en général- restaient très limitées. Certes il avait conscience qu’elle s’éloignait de la sienne, que les traditions étaient en tête de liste. Mais Alexander ignorait à quel point son ami avait dû s'ajuster en atterrissant sur le territoire des États-Unis. À quel point le choc culturel fut dur. Mais Kei s’en sortait à merveille tel un caméléon.
Une fois l’entrée passée, ils se retrouvèrent déjà parmi les vieux. Soupir silencieux, Alex mentionna déjà la notion de l’alcool. Quoi de mieux pour faire passer la soirée plus vite? De perdre un tant soit peu la notion du temps pour éviter de voir les aiguilles de l’horloge stagnées -ou même pire, reculées sur le cadran-. Même si Kei trouvait que son ami était un peu trop vite sur l’évocation de la boisson.

- Ce n’est pas un verre ou deux qui m’empêchera de marcher droit! Et si ton boulot consiste qu’à les convaincre qu’ils ont besoin d’un moment détente, c’est vite plié! Mais oui, je veux bien cette avant-première! J’aurai le droit aussi au massage? Autant profiter de l’expérience complète!

Il poussa sa chance. Déjà avoir l’opportunité de mettre les pieds dans la nouvelle installation d’Urban Spa avant qu’il soit offert aux clients devrait déjà le contenter. Mais en ce moment, il avait les yeux plus gros que le ventre, peut-être c’était dû au fait que son estomac commençait à réclamer de la nourriture. Mais timing parfait, l’aîné des Walsh suivit les pas du nippon qui se faufilait vers les innombrables amuse-gueules qui reposaient sur la lignée de table au fond de la pièce.
Même si leur chemin fut parsemé d'échanges rapides avec les autres invités du manoir, Alex s’arrêta toujours aux côtés de Kei, arborant le plus parfait des sourires. Ne souhaitant pas envahir les platebandes du japonais, le soi-disant sauveur de la soirée préférait rester en retrait, à moins qu’il soit sollicité par l’un des interlocuteurs lors des échanges rapides, profitant au passage de présenter la montre qui ornait son poignet -le tout nouveau produit de l’entreprise familiale horlogère-.
Arrivé à destination, il attrapa quelques casse-croûtes pour apaiser les cris de famine de son corps. Son accompagnateur lui offrit le champagne et Alexander éclata de rire.

- À ton super-héros préféré! dit-il en portant le verre à ses lèvres. Il faut savoir en tirer avantage de ces endroits! On n’a pas encore leur âge, on est jeune. Nous avons d’autres préoccupations que d’organiser des événements de ce genre…

D’ailleurs, il se demanda si une fois arrivé à cet âge avancé, ces soirées mondaines allaient toujours être identiques ou si celles-ci évolueront. Il espérait le deuxième cas, mais son esprit réaliste le rattrapa. Ces moments avaient pour seul et unique but de pousser les riches à dépenser leur centaine de billets colorés chez d’autres millionnaires. À tisser des liens entre les familles de la haute société, tout en créant aussi des ennemis.
Alex laissa parfois son acolyte faire son boulot sans être dans les parages, il en profita pour se rassasier comme il se devait et décrocher un second verre d’alcool à un serveur qui passa dans le coin -évidemment il en attrapa un pour Kei-. Il n’allait pas être le seul à boire plusieurs verres ce soir! Il lui tendit lorsque son ami revint auprès de lui. Le futur héritier saisit l’occasion pour se moquer de lui en mentionnant qu’il se camouflait à merveille parmi les vieux de la place! Que s’il ne s’agissait pas de sa chevelure noire comme la nuit qui le distinguait des autres, il ne saurait le reconnaître dans la foule.

Interpellé à son tour par des amis de son père, Alex se mordit les lèvres un instant avant de se résoudre à abandonner son compagnon à son tour. Il abrégea au plus qu’il pouvait et lorsqu’il tourna la tête, il constata que Kei manquait à l’appel. Après un rapide tour des lieux, il le repéra à l’extérieur et s’empressa de le rejoindre.
Contrairement à lui, il s’adossa contre balustrade. Il tourna la tête lorsqu’il entendit la voix du japonais avant de sourire.

- Ton pays te manque-t-il à ce point? lança-t-il en continuant de le fixer de ses iris bruns. J’accepte à une condition, que tu me fasses découvrir les petites merveilles du Japon. Et être mon interprète, ajouta-t-il après quelques secondes.

L’air frais de la nuit caressa son visage. Le contraste de température avec l’intérieur du manoir le frappa, mais lui accorda un rafraîchissement. Il dénoua à peine le nœud qui lui collait à la gorge, mais suffisamment pour apprécier chaque bouffée d’air.

- Plus sérieusement, tu regrettes d’être aux États-Unis? questionna-t-il en laissant tomber le sourire, s’inquiétant plutôt pour son ami. Tu disais plutôt que ton monde est chiant depuis que tu as mis les pieds sur le sol américain et là tu me demandes de t’apporter avec moi si je vais dans ton pays natal.

Peut-être que Kei ne faisait qu’émettre un désir quelconque sans souciance, mais le blond souhaitait le sonder à ce sujet, cherchant à en avoir le cœur net.

Un autre monde

@Kei Tamamori

Kei refusait de vêtir cette étiquette d’organisateur de soirées barbantes, Alex le sentait dans ses propos. Il partageait en fait le même point de vue. Même lorsque son âge atteindra le demi siècle -et encore passé ce cap-, il se doutait que l’intérêt n’y serait pas plus au rendez-vous qu’en ce moment présent. Seulement il y avait une différence entre avoir le plaisir de mettre sur pied ces événements ainsi que d’y participer et le devoir de le faire. Mais le tout paraissait si loin encore aux yeux de l’américain. Qui sait ce que l’avenir leur réservera également? Alors pourquoi se soucier de ces incertitudes? Ces tracas imaginaires n’étaient que suppositions, mais les vieux présents, eux, étaient bien réels et continuaient de les accaparer de temps à autre, forçant les deux amis à devoir se quitter momentanément.
De nouveau en compagnie de son camarade de soirée, Alex questionna le japonais sur ces derniers propos. Il le vit sur son visage fuyant que Kei regrettait d’avoir survolé le sujet dont l’américain creusait davantage. Mais si celui-ci ne souhaitait pas y répondre, le blond laissera le tout couler. Ses intentions étaient loin de mettre son ami dans l’embarras ou de discuter d’un sujet peut-être trop sensible pour lui.
Alexander resta muet un moment, mais le silence fut brisé par une réponse inattendue du japonais. le caucasien releva la tête, le sourire qui revint à lenteur d’une tortue sur ses lèvres. Pour le plus vieux, ce n’était même pas une hésitation dans son esprit. Si ça ne posait aucun problème à ces deux acolytes, c’était avec certitude qu’il l’embarquera dans l’une de ses valises!

La discussion fut cependant interrompue par l’homme originaire du Japon lorsqu’il mentionna que leurs présences étaient requises ailleurs. Peut-être n'était-ce pas plus mal? Cela pourrait éviter un autre malaise où Alex ouvrirait la mauvaise porte.
Il talonna son ami jusqu’à franchir à nouveau l’intérieur du manoir où la chaleur le happa. Il retira la veste de ses épaules en poursuivant sa route jusqu’à arriver à ce groupe de dames. Un sourire hypocrite se forma sur le visage du blond lorsque son nom fut prononcé. Et celui-ci y resta gravé lorsque l’invitation fut lancée. Invitation ou plutôt obligation de la part de la femme qui avait fait signe aux deux hommes -et dont Alex n’avait pas du tout porter attention-.
Dans un automatisme, les talons du blondinet se tournèrent en direction de son compagnon. Leurs regards eurent le temps de se croiser, mais ce fut le seul geste qu’Alexander put faire avant que le japonais prenne les devants et accepte la requête en leurs deux noms. Ses yeux s'écarquillèrent, mais l’américain se ravisa. Il ne pouvait décliner à présent et avait les deux pieds dans la tombe.
Après une inspiration rapide, les traits de son visage s’adouçirent.

- Nous allons nous revoir à cette soirée déguisée! J’en suis impatient, dit-il, afin de rester poli.

Légère révérence avant de quitter les dames tel un gentleman, il relaxa lorsque les deux hommes furent de nouveau à l’écart des invités.

- Tu as bien le don de m’engouffrer dans tout ce qui passe! lança-t-il en guise de réponse alors que son ami se foutait de lui. La soirée n’est même pas encore achevée que tu m’emprisonnes à une autre!

Mais pour une fois, il devait l’admettre, ça sera intéressant comme sortie. Ça changera de celles-ci, bien que pour cette prochaine, il faudra qu’il déniche un costume. Mais Kei était là pour ça! Il lui devait bien en fait!

- Tu te chargeras de nous trouver des costumes! Je songerai ensuite à te pardonner.

Il tenta de garder son sérieux, mais un sourire sur les lèvres le trahit. Il s’imaginait leur duo avec des déguisements assortis. Il espérait silencieusement avoir des masques comme accessoire afin que leur identité soit plus difficilement reconnu, ce qui leur donnera un avantage pour s’extirper comme bon leur semble.
Kei attrapa une nouvelle coupe de champagne. Sans même attendre, le blond la porta à ses lèvres. La seconde suivante, il sentit ce liquide pétillant remonter, emprunter le chemin inverse que son corps tenta de lui faire prendre. Avec peine, il parvint à forcer la descente, mais s’étouffa au passage. Le corps brièvement penché vers l’avant, il se donna quelques coups au torse. Décidément, son ami avait le meilleur des timing!

- Prochaine fois, attends que mon verre soit terminé!

Son souffle lui revint enfin. Il  se redressa pour croiser le regard brun de son ami. Était-il réellement sérieux?

- Je ne suis pas le meilleur des amants, avoua-t-il en enchaînant avec une seconde gorgée. Tu ne voudrais pas être le mien plutôt?

Alex plaisanta avec sa dernière phrase. Aussi bien retourner la situation en sa faveur et déstabiliser le japonais à son tour.

Un autre monde

@Kei Tamamori

- Et la raison pour laquelle mon nom a été émis est que je suis présentement en ta compagnie après que tu m’aies envoyé l’alerte rouge cet après-midi, répliqua-t-il avec le sourire pour rafraîchir la mémoire.

Cela relevait d’un enchaînement de plusieurs événements, mais qui occasionnaient chacun une incidence les uns sur les autres.
En y réfléchissant, que sa présence soit là ou non en cette soirée, le résultat aura bien fait d’être le même. Son ami l’aurait rameuté tout comme ce soir. Donc dans tous les cas, il se trouvait pris au piège et il se devait d’honorer l’invitation à ce bal costumé -bien que cette fois, une meilleure intuition le guettait-. Du moins le concept de cette réception était déjà plus amusant que celui où ils se plongeaient en ce moment même. Coincé dans son costard qui lui collait à la peau.
Alex ne put étouffer son rire suite à l’indignation de son compère à l'objet des costumes.

- Tu n’as pas besoin de ce prétexte pour qu’on se voit, tu le sais bien.

Leur amitié persistait au-delà d’avoir mis le pied hors de ces soirées de riches accablantes. Il suffisait seulement que le japonais lui en fasse la demande et le blond répondra aussitôt présent. Ils avaient déjà prouver l’un à l’autre qu’ils ne se fréquentaient point pour voler le prestige ou pour se faire valoir aux yeux des autres familles de la haute société.

- Si je m’occupe des costumes, ça sera des kimonos avec les masques d'ogres rouge!

Il faisait référence aux Oni avec leurs longues cornes noires et leurs dentitions bien mises en évidence. L’option d’une autre façade plus élégante pouvait aussi être envisagée; celui du Kitsune, le renard à neuf queues. De quoi cacher les traits de leur visage en fin de compte.
Mais il se doutait bien que ça ne serait point considérer comme un déguisement aux yeux de l’homme originaire du Japon. Cela provenait de sa culture au pays du soleil levant. Il n’avait pas le même regard que le sien, celui d’un ignorant occidental. Mais Alex appréciait l’idée de vêtements amples qui permettraient à sa peau de respirer. De sentir l’air se profiler sur son corps. Tout le contraire de ces habits conventionnels qu’ils vêtissaient au sein de ce manoir.
Ils pourront discuter plus en détails des costumes un autre jour. D’autres préoccupations cognèrent à leur porte. Comme Kei qui tentait d'assassiner son compagnon avec son timing calculé.

- Donc tu souhaites avoir ma mort sur la conscience? Je devrais choisir mes amis avec plus de précaution, dit-il faussement offusqué.

Mais il se rattrapa par la suite. Il savait qu’un mur l’attendait. Le japonais détournait le regard que sur les jolies courbes féminines, mais la tentative en valait tout de même la peine. Ce fut de peu que le plus jeune esquiva le même sort que son comparse quelques secondes plus tôt… Meilleure chance la prochaine fois, même si l’asiatique souhaitait rembobiner le moment présent pour y offrir un nouveau dénouement.

- Ça manquera de spontanéité! Tu as raté ta chance! nargua le Walsh en lui tirant la langue à son tour. J’ai dit que je n’étais pas le meilleur des amants, pas que j’étais mauvais. Et pour toi je ferai des efforts!

Même si Alex n’était pas sérieux dans ses propos, rien ne l’empêchait de taquiner son collègue de soirée. De vrais adolescents dès que les vieux tournaient le dos.
Bien qu’ils furent de nouveau interrompus, cette fois l’occasion de s’éclipser du manoir leur était tendu sur un plateau d’argent. Il n’en fallut pas moins pour que Kei la saisisse et le blondinet n’allait certainement pas s’en plaindre.

Le retour fut plus qu’apprécier. Alexander acquiesça aux dires du plus jeune. Il se montra respectueux envers les traditions japonaises qui régnaient au penthouse, enfilant les chaussons qu’on lui désigna. Ces coutumes qui se différençaient à mille à l’heure de celles des américains.
L’idée de la douche plût au blond. Se débarrasser de la sueur avant de se plonger sous les draps pour la nuit était plus que bienvenue. Il se dirigea vers la salle de bain et commença à se dévêtir. Il s’arrêta net, se rendant compte qu’il n’avait pas prévu le coup et qu’aucun vêtement de rechange ne l’attendait après son passage sous l’eau -Kei l’ayant invité à rester dormir sous son toit après coup-. Avant de retirer son pantalon ainsi que sa chemise -même si celle-ci était déjà déboutonnée-, il rebroussa chemin et retrouva son hôte dans sa chambre.

- Ah, désolé Kei… souffla-t-il alors que le japonais était aussi en train de se préparer pour la nuit. Tu aurais quelques vêtements à me refiler?

Ayant un corps frêle, il pouvait se permettre de voler à court terme des habits de son ami. Il se faufila ensuite sous la douche avant de rejoindre son ami sous les couvertures.
Les nuits restèrent fraîches et cherchant davantage de chaleur, Alex se rapprocha du propriétaire du lit jusqu’à ce que leurs deux corps se joignent -faisant ainsi son serpent, s’emparant de la température corporelle d’autrui pour pallier au froid-.

Un autre monde

@Kei Tamamori

Comme c’était intéressant! Le premier intéressé qui ne souhaitait pas prendre en charge les costumes, soudainement changea son fusil d’épaule. En fin de compte, peut-être que l’idée du blondinet plaisait à l’originaire du pays du soleil levant -voulant mettre à profit sa connaissance de sa propre culture pour éviter que l’américain lui ramène une simple réplique que l’on refile au premier touriste ignorant-. Le japonais avait eu le bon réflexe. Son ami ne parviendrait pas à saisir les subtilités de ces habits traditionnels aux manches si amples ainsi qu’aux innombrables couches de tissus. Oh cet aîné des Walsh ignorait à quel point la complexité du kimono était supérieure à celle d’enfiler un tuxedo.
L’américain lui lança d’un simple sourire « Tu ne me fais pas confiance? » sans en être vexé avant de passer à la suite. Suite qui ne tarda pas à ce qu’ils puissent retrouver le confort de la demeure de Kei. Retrouvant leur tranquillité d’esprit loin des discords et conversations soutenus.

Avant de filer sous la douche, le blond capta qu’il n’avait aucun vêtement de rechange. Il aurait pu s’affairer à trouver une solution après, sortant avec une simple serviette autour de ses hanches, mais il préféra se garder une petite gêne entre eux.
Après avoir obtenu l’aide de son hôte, il opta pour des manches longues dans le choix qu’il lui donnait. Cette étape accomplie, le plus vieux se faufila dans le lit avant d’y sombrer paisiblement.
Ce n’était pas les rayons du soleil qui extirpèrent en premier lieu l’américain des bras de Morphé, mais une sonnerie. Sonnerie qui savait ne pas être la sienne, la seule information que son cerveau traita -encore trop endormi pour aller plus loin dans une réflexion des plus futiles-. Le son du téléphone fut bref, permettant ainsi à Alex de somnoler, point prêt à faire face à la journée. Il se blottit contre lui-même, tirant sur les couvertures afin de conserver son cocon de chaleur.
Ce n’était pas la chute de Kei qui le rappela vers la réalité, mais plutôt sa voix -qui lui paraissait si lointaine dans son esprit-. Il tourna dans le lit, les yeux toujours clos, combattant à moitié le sommeil qui persistait à le guetter. Mais si son ami s’était déjà extirpé du confort que le lit offrait, il devra bien en faire autant. Il fouilla au plus profond de son corps pour y débusquer l’énergie de chasser la somnolence qui le gardait toujours captif.

Les yeux bruns d’Alex durent s’adapter à la luminosité de la pièce un court moment alors qu’il glissa son corps hors du lit. Prenant peu à peu conscience de son environnement, le blond discerna la voix de son hôte dans une pièce voisine. Le sens des propos resta une énigme pour l’américain. Il jeta la faute sur le fait qu’il venait de s’extraire d’une nuit de sommeil et que son cerveau tardait à collaborer.
Néanmoins, ses pas le dirigèrent vers la porte qui ouvrait sur le salon. La voix de Kei s’éclairsissait au fur et à mesure qu’il s’en approcha. Alexander parvenait à présent à distinguer les sons, mais toujours autant indéchiffrables pour sa personne.
Une main se posa sur la poignée et enclencha le mécanisme. La porte s'entrouvrit et à ce même moment son cerveau capta que si il n’arrivait pas à déceler ce que son hôte prononçait, c’était bien que la langue employée n’était pas celle dont les deux hommes utilisaient pour discuter entre eux, mais plutôt celle maternelle du japonais. Un moment d’hésitation saisit Alex, se rendant bien compte que si son ami discutait par l’intermédiaire de la langue de son pays natal, le sujet devait relever de la plus haute importance et donc, le blondinet ne devrait pas s’immiscer dans cette pièce et épier la conversation. Épier… comment pouvait-il penser à cette action alors qu’il ne pigeait rien?
Il attendit patiemment que son ami ait mit fin à la conversation téléphonique avant de faire valoir sa présence dans le salon.

- Tu parlais avec un membre de ta famille? lança-t-il, sa curiosité étant déjà piquée depuis un moment.

Un autre monde

@Kei Tamamori

Dès que son hôte s’excusa de l’avoir extirpé de son sommeil, Alexander s’empressa de lui faire signe qu’il n’y avait rien de grave là-dedans. Il aurait bien fait de se réveiller à un moment où à un autre. Autant profiter que son ami n’était plus dans les bras de Morphée et profiter de la matinée. Admirer le paysage de la baie que le salon offrait, mais pour en apprécier à sa juste valeur, l’américain devait chasser encore la fatigue qui persistait dans ses yeux.
Or, la réponse à sa précédente question ne tarda pas à lui être acheminée. Sa mère. Voilà qui venait confirmer la raison pour laquelle le blond n’avait simplement rien capter de la conversation. Après tout, cela ne le regardait pas, même si une certaine curiosité traînait toujours dans un coin. Se retrouver à l’autre bout du monde, loin de sa famille… Peut-être que la réflexion de la veille venait de cette situation. La raison pour laquelle le japonais souhaitait retourner au pays du soleil levant.
Cependant, la compréhension sur le visage d’Alex laissa place à la surprise en entendant que la daronne souhaitait faire sa connaissance. En dévisageant Kei, il aperçut ce sourire qui l’inquiéta. Il n’y décela aucune malveillance, mais le caucasien se douta que son ami avait une idée derrière la tête. Dans tous les cas, il discerna la joie sur les traits du nippon. Depuis son arrivée sous le sol américain que l’étranger n’avait pas pu interagir en face à face avec sa famille. Alexander pouvait tout à fait comprendre, lui même voyant que peu ses grand parents qui résident toujours au Royaume-Uni -bien que la technologie permettait d’échanger facilement et même de voir ses proches à travers un écran, mais rien n’équivalait à pouvoir les serrer dans ses bras, les sentir contre nous-. Mais l’américain était loin de se douter de la réelle situation familiale de son ami, que tout était bien plus complexe et que cet appel provenant de sa mère relevait quasi du miracle -mais chacun son jardin secret-.

Alexander suivit la direction que les prunelles brunes de son ami jusqu’à ce que son propre regard atterrisse sur le cadre en question. Il s’en approcha, échappant un bâillement au passage dont il s’empressa de porter une main devant sa bouche.
Sans problème il reconnut Kei et par les informations, la femme à ses côtés se révélait être sa mère. À ses yeux, il ne pourrait s’avancer quant à exprimer qu’ils étaient bien de la même famille. Il n’y avait rien de bien méchant, mais les japonais se ressemblaient tous. Les cheveux noirs, les yeux bruns, la diversité était moindre que les occidentaux dans les apparences. Mais une chose était certaine; la mère sur le portrait semblait jeune. Tout comme Kei d’ailleurs. Un très bon côté d’avoir ses origines asiatiques. Ils ne faisaient aucunement leur âge.
Il était néanmoins apprécié d’être en mesure d’associer un visage sur une personne -même si le nippon affirmait que tôt ou tard, ils finiraient par se croiser-. Mais ça enlevait un poids sur les épaules du blond d’accumuler quelques informations supplémentaires avant la fatidique rencontre. Aussi futile l’info peut être. Tout comme l’arrière-plan qu’il réalisa et identifia rapidement comme le château de Disneyland. Probablement pas celui du sol américain.

- Tu dois avoir hâte qu’elle vienne en vacances ici… souffla-t-il en reprenant les mots de son hôte tout en continuant de fixer le cadre. Il va falloir me dire vos secrets pour toujours paraître vingt ans plus jeune!

Il se doutait qu’il n’y avait aucun réel secret et que la génétique ainsi que les origines jouaient pour beaucoup. Pour tout à vrai dire.
Il n’osa guère questionner davantage, ne souhaitant pas empiéter trop dans la vie privée de Kei. Un second bâillement s’échappa d’Alex. Sa fatigue le trahissait.

- Je prendrai bien un café comme tu me l’as promis!