Game date ft. Daryl

Ça faisait quelque temps que Noriko s’était inscrite sur Tinder, pas vraiment pour trouver l’amour, elle n’y croyait pas à ce genre de choses. Mais surtout pour agrandir son réseau, elle était arrivée à Klamath Falls il y a environ 2 ans et bien qu’elle gérait la rubrique gossip du journal de la ville, elle ne connaissait pas beaucoup de monde. Principalement dû à son mauvais caractère. En réalité, elle connaissait beaucoup de mondes, grâce aux articles de Scandale et aux enquêtes qu’elle menait, mais elle n’avait pas beaucoup d’amis. L’application de rencontre était donc une aubaine pour entrer en contact avec des inconnus de la ville. Evidemment, ça ne se passait pas toujours comme prévu, elle avait déjà un de ses rendez vous qui ne s’était jamais présenté. Elle s’était pris un bon gros lapin et elle l’avait toujours en travers de la gorge. Elle préparait donc son plan de vengeance contre Misha doucement mais sûrement.

Aujourd’hui, elle avait rendez-vous avec Kai, il avait été bien mystérieux sur son profil, ne montrant pas son visage et ça avait intrigué l’intérêt journalistique de la japonaise. Les seules raisons qu’il avait de cacher son visage était soit qu’il était extrêmement moche ou qu’il était connu. Clairement, Noriko espérait qu’il était connu, qui sait, elle pourrait avoir un interview avec lui ? Et s’il était moche, elle trouverait une excuse pour partir. Ça ne lui donnait aucunement mauvaise conscience de faire ça. Ils s’étaient mis d’accord pour un rendez-vous au centre d’arcade de la ville, le “Gameworks” et elle avait pris très au sérieux le défi qu’il avait donné. Elle comptait bien gagner le plus de parties, espérant qu’il y ait des jeux dont elle avait eu l’habitude de jouer quand elle habitait au Japon. Elle avait passé tellement de soirées dans les boutiques d’arcades à danser sur les rythmes d’une chanson de Jpop. Mais elle doutait qu’elle puisse entendre du Arashi sur une arcade de Klamath Falls… Ce qui était bien dommage.

Avec l’automne le temps s’était rafraîchi, c’était donc un peu plus couverte que les précédentes semaines que Noriko se rendit à son rendez vous. Elle s’était assurée de mettre un pantalon, prête à tout pour gagner lors des parties sur les arcades et clairement, une robe ou une jupe n’était pas assez pratique pour que ce soit le cas. Elle arriva en avance, préférant se familiariser avec l’endroit avant que Kai arrive, elle ressortit le profil de l’homme et tenta de le trouver dans les personnes présentent. Il avait dit qu’elle le reconnaîtrait assez facilement. C’est vrai qu’il avait l'air de dire qu’il était un géant. Elle observa donc les personnes les plus grandes, mais personne ne semblait correspondre aux photos de dos qu’elle avait pu voir. Elle attendit donc prêt de l’entrée, dévisageant les personnes qui passaient la porte. Un membre du staff allait certainement finir par lui demander de s’en aller car elle faisait peur à la clientèle, mais elle vit enfin quelqu’un qui correspondait au photo, elle leva son téléphone pour comparer la personne et la photo et trouva que la ressemblance était assez proche. Sans grande hésitation, elle s’approcha et tapa dans le dos du géant en chemise à motif qu’elle pensait être Kai et l’appela par le prénom qu’elle avait eu sur Tinder :

-Kai ?

À ne pas confondre avec le prénom de son ex fiancé Kei…

Daryl ne s’était pas inscrit sur Tinder dans le but de trouver l’amour. D’ailleurs, peu d’hommes s’y inscrivent pour cette raison, soyons réalistes. D’autant qu’il était à peu près certain de ne pouvoir rendre une femme heureuse, parce qu’il est de notoriété publique qu’il n’est pas le plus romantique des hommes, c’est un fait qu’il a prouvé malgré lui à de nombreuses reprises. Il avait hésité longtemps à faire son profil, notamment à cause de sa célébrité. Mais sa solitude naissante l’avait poussé à franchir le cap. Non sans prudence néanmoins, le quadragénaire n’avait divulgué aucune photo de son visage. Et honnêtement, vu le nombre de personnes qui usurpent l’identité des stars pour faire “don” de smartphone dernier cri, il n’aurait de toutes manières pas été pris au sérieux. Alors il s’était contenté de cliché de dos, la plus révélatrice lui cache l’entièreté du visage avec un masque et des lunettes de soleil. Sa description elle, était à l’image de ses images : peu fournie en détails. Présente simplement dans le but de rassurer ces demoiselles sur ses intentions. Non, il n’était pas un dangereux psychopathe, quand bien même son apparence imposante pourrait induire en erreur.  

Daryl voulait simplement un peu de compagnie, si elles n’étaient pas enclines à passer une nuit avec lui, il pourrait au moins s’en faire des amies. Ce serait bien une première, parce que l’acteur n’a pas d’amies à proprement parler, seulement des conquêtes. Mais il avait déménagé dans cette ville dans le but de calmer ses ardeurs, d’expérimenter une vie plus simple, loin des tentations. Dans la logique des choses, c’était bien débuter que de se lier d’amitié avec une femme.  

Alors il ne s'était pas préparé ce jour-là dans l’intention de charmer la dame, si cela devait arriver tant mieux, le cas échéant, il ne serait pas déçu. D’autant qu’elle est mignonne la demoiselle, un visage fin avec de magnifiques traits, comme beaucoup de Japonaises qu’il avait pu croiser en faisant le tour du monde pour promouvoir ses films. Bien évidemment il n’en faisait pas non plus une généralité, mais avouons tout de même qu’elles sont adorables. Fans de lui elles sont trop criardes mais extrêmement bienveillantes. Nul doute que son date du jour ne ferait pas exception, surtout qu’il avait beaucoup apprécié discuter avec elle.  

C’est donc fièrement habillé d’une chemise à motif –comme à peu près tous les jours, sa garde-robe en étant remplie- qu'il se rend au lieu de rendez-vous. Un centre d’arcade, voilà un endroit qu’il n’avait pas côtoyé depuis des lustres. Il n’en avait plus trouvé le temps entre les tournages, les voyages, sa famille et ses addictions. Pourtant il les avait aimées ces machines, notamment les flippers, à l’ancienne. Il y passait toutes ses après-midis lorsqu’il était au lycée, la bonne époque.  

Téléphone en main, Daryl sélectionne l’une des photographies de la jeune femme avant de regarder autour de lui. Omettant de se retourner, c’est avec légère surprise qu’il sent une petite main lui tapoter le dos. Il enlève ses lunettes de soleil et tout de suite il distingue la jeune femme, la reconnaît sans difficulté et lui sourit. « Kai ? » Ah oui, il y avait cela aussi, il n’avait mentionné que son prénom Hawaiien.  

— Daryl pour être plus précis, Kai est mon prénom Hawaiien. D’un air jovial et chaleureux, il poursuit. Bonjour, tu es Noriko j’imagine ? Enchanté de te rencontrer. Un sourire taquin se dessine sur son visage. Et voilà plus de mystère, j’espère avoir un minimum titillé ta curiosité, tu n’es pas trop déçue j’espère ?

Incroyable, Noriko ne s’était pas doutée une seule seconde qu’elle discutait avec Daryl Mahelona sur Tinder. Elle savait évidemment qui c’était, il était une star internationale et même si elle était aussi au courant qu’il avait emménagé en ville, elle était loin de s’imaginer qu’elle arriverait à dégoter un date avec. Son instinct de journaliste lui disait de lui proposer une interview immédiatement, mais elle dût se retenir, elle n’était pas là pour ça et qui sait, si elle s’entendait bien avec lui, peut être qu’elle aurait des informations exclusives ? Elle avait déjà hâte de voir son article dans le journal lui permettant ainsi de faire sortir son nom en dehors des limites de Klamath Falls.

C’était donc un visage surpris que Daryl a pu voir en se retournant, une Noriko qui ne s’attendait pas à se trouver en face d’un acteur connu. Et si on regardait bien, on pouvait presque voir des étoiles quand elle pensa à l’article qu’elle pourrait écrire. Elle ne comprit pas de suite ce qu’il lui disait trop surprise, mais l’information finit par atteindre son cerveau et elle se secoua :

- Désolé, je ne m’attendais pas à me retrouver face à une célébrité aujourd’hui… J’en ai perdu la parole. Et oui, c’est bien moi Noriko, enchantée et non non, je ne suis pas déçue de m'être fait catfisher !

Elle devait lever la tête pour le regarder dans les yeux, bien plus petite que lui et pourtant, elle n’était pas la plus petite du Japon du haut de ses 1 mètre 64. Mais ce n’était rien face au presque 2 mètres de Daryl. Elle demanda comprenant que Kai était le prénom hawaiien de Daryl :

- Tu préfères que je continue de t’appeler Kai ? Ou Daryl ?

Elle s’était un peu habituée à Kai maintenant qu’elle lui avait parlé sur Tinder, mais en voyant son visage, c’était Daryl. Tout ça la rendait confuse. Il fallait qu’ils bougent, à rester planté là, ils ne faisaient que attirer l’attention et ils avaient une salle d’arcade à tester. Elle montra la machine pour acheter des jetons et demanda :

- On commence de suite avec les jeux ou tu veux qu’on se prenne quelque chose à boire dans le café ?

“Café” était un grand mot, c’était surtout un bar où les jeunes achetaient des red bulls et de l’alcool. Mais c’était peut être une bonne idée de s’asseoir quelques instants pour faire connaissance, même si Noriko avait hâte de gagner ses parties sur les arcades contre Daryl. Elle pourrait se vanter qu’elle l’avait battue. Elle espérait aussi qu’il soit celui qui paye pour les jetons et la boisson, depuis qu’elle n’avait plus la carte bancaire de son père, Noriko était devenue très radine et n’hésitait pas à profiter de l’argent des autres. Et puis, elle savait que Daryl était une star, il devait bien avoir un joli compte en banque, acheter quelques jetons ne devaient certainement pas être un gros souci pour lui. Décidément, ce date Tinder s’annonçait beaucoup mieux que celui avec Misha Kane qui lui avait posé un lapin, espérons que ça continue comme ça et qui sait, peut être qu’elle pourrait devenir amie avec Daryl. Elle n’espérait pas vraiment plus, elle connaissait son mauvais caractère…

S’il n’était pas autant sur ses gardes, Daryl aurait presque oublié que sa partenaire du jour est journaliste. Non pas qu’il soit réticent au point de tourner les talons, après tout, il a swipé en toute connaissance de cause, simplement il n’a pas pour habitude de se mêler à la presse, autant professionnellement qu’intimement. Alors il ose espérer dans son for intérieur que Noriko ne succombera pas à ses instincts professionnels, qu’il s’agit là d’un rendez-vous tout à fait innocent –si tant est qu’il le reste jusqu’au lendemain mais encore une fois, ce n’est pas un passage obligatoire-. Bien évidemment la réaction de la belle avait été plutôt drôle, rien d’étonnant à ce qu’elle soit surprise, ce n’est pas tous les jours qu’une célébrité s’inscrit sur Tinder et encore plus dans une petite ville comme Klamath Falls. « Désolé, je ne m’attendais pas à me retrouver face à une célébrité aujourd’hui… J’en ai perdu la parole. Et oui, c’est bien moi Noriko, enchantée et non non, je ne suis pas déçue de m'être fait catfisher ! » Un rire franc lui échappe, effectivement, son profil avait tout l’air d’être un faux compte étrange mais avait-il eu réellement le choix de procéder de cette manière ? Déjà qu’il avait dû vérifier à plusieurs reprises qu’il n’avait pas déjà publié ses photos sur son instagram officiel, toute une organisation pour une simple inscription sur Tinder...

— Je peux comprendre. Mais aujourd’hui tu ne fais pas face à la célébrité...plutôt à l’homme. Ravi que tu ne sois pas déçue en tout cas.

Moyen détourné pour lui dire qu’elle n’aura aucune information sur sa vie personnelle ni la moindre interview, s’il a quitté New-York ce n’est pas pour être l’attraction touristique de sa nouvelle ville, bien qu’il soit conscient que sa présence soit un évènement, Daryl aime mieux vivre sa petite vie en toute tranquillité sans avoir à être poursuivi par les paparazzis de KF. Puis pourquoi être le centre de toute l’attention lorsque l’on discute avec une si belle femme ? Quand bien même cela lui ferait plaisir, lui trouve cela très irrespectueux. « Tu préfères que je continue de t’appeler Kai ? Ou Daryl ? » Le quadragénaire lève les épaules.

— Tu m’appelles comme tu veux, les deux me vont.

Son père l’appelle davantage par son prénom hawaïen, Kai, quand sa mère l’appelle plutôt par son prénom anglo-saxon, Daryl. Alors bien sûr il se fiche bien de quelle manière on s’adresse à lui. « On commence de suite avec les jeux ou tu veux qu’on se prenne quelque chose à boire dans le café ? » Le plus âgé fixe la machine à jetons puis lance un regard au barman.

— On peut peut-être faire les deux, non ? J’risque pas de me faire voler mon Monaco quand j’ai le dos tourné, du moins j’ose espérer...hein barman ?  

Il fait un signe de tête au barman décontenancé, commande sa boisson puis laisse la jeune femme faire la même chose. Il propose une chaise à son interlocutrice avant d’entreprendre l’achat de plusieurs jetons. Daryl n’a pas pour habitude de faire payer les femmes, ni même les hommes. Lorsqu’il invite il paye systématiquement la note, et ce même lorsqu’il avait à peine de quoi manger dans le mois. C’est d’autant plus fréquent aujourd’hui qu’il est riche depuis les blockbusters, ce serait bien égoïste de sa part de ne pas offrir cette journée à la demoiselle.

— Je nous ai pris des jetons. Il dépose quelques-uns de ces jetons disposés en une petite tour face à son interlocutrice. Rien ne nous empêche de faire connaissance en jouant, personnellement je ne suis doué qu’au flipper et aux bornes d’arcades de basket. Si tu veux me laminer, je te laisse le choix du premier jeu.  

Sans même qu’elle n’ait eu le temps de répondre, le barman apporte les boissons à leur table, non loin des arcades. Avant de siroter le contenu de son verre, il trinque avec celui de la japonaise. Tout en profitant de sa boisson au très faible taux d’alcool -restons sages pour le moment-, le quadragénaire distingue la belle et lui sourit.  

— Dis-moi...pourquoi avoir déménagé à Klamath Falls ? C’est une petite ville pas bien connue du monde entier, je serais curieux de savoir ce qui t'a amenée ici.

Impossible pour Noriko de ne pas envisager une interview avec Daryl, mais sa réponse la refroidit. Elle comprend le sous entendu, il n’était pas l’acteur international aujourd’hui mais seulement un homme normal. Très bien, elle garderait sa curiosité pour plus tard. Et elle n’avait pas l’argent pour se payer un avocat s’il décidait de lui faire un procès pour avoir divulgué des informations privées. Elle devait prendre son mal en patience. Elle décida de le rassurer:

- Aujourd’hui, pas de célébrité et pas de journaliste.

Elle lui fit un clin d'œil, tout en se demandant s’il avait oublié le travail qu’elle avait noté dans son profil Tinder. Il jouait un peu avec le feu d’avoir accepté de la rencontrer. Elle n’avait pas encore décidé quel nom utiliser pour s’adresser à lui, quand elle pensait au gars de Tinder, elle avait le prénom Kai qui se présentait, quand elle regardait le visage, c’était Daryl… C’était tout de même assez perturbant tout ça. Elle conclut qu’elle n’allait plus se prendre la tête et utiliser ce qui lui venait.

Proposition, boire un verre ou se lancer dans les jeux, les deux apparemment car Daryl commande déjà un cocktail, ce que Noriko fait également, n’étant pas une grande fan de bière, elle privilégierait les cocktails sucrés. Elle devait par contre faire attention à la quantité d’alcool qu’elle prenait, n’étant pas un grand gabarit, elle se retrouvait pompette un peu trop rapidement. Elle s’installa sur une chaise du bar en attendant que son date parte chercher des jetons, pour l’instant, il payait tout et ça satisfaisait totalement la japonaise. Elle qui autrefois avait une carte sans fond… Elle regrettait amèrement l’argent de son père. Kai revient vers elle, le barman leur sert leur apporter leurs boissons. Elle trinque avec lui et poliment le remercie pour le verre et les jetons :

- Merci d’offrir à boire et les jeux.

Il lui pose alors une question personnelle, question qu’elle ne peut pas répondre sincèrement, pourquoi elle avait déménagé à Klamath Falls? pour fuir son mariage arrangé, alors que son rêve avait toujours été d’écrire pour les plus grands journaux du monde. Elle donne une fausse vérité:

- Je suis amie avec une des Fujiwara, ceux qui ont les hôtels de luxe en ville, ils m’ont parlé de Klamath Falls, de l’Oregon et puis, j’avais besoin de partir et faire profil bas, donc me voilà. Et toi ? Promis, c’est pas pour m’en servir dans un article.

Elle lève ses bras innocemment, c’était vrai, elle était peut être sournoise, mais elle avait dit qu’elle ne serait pas journaliste aujourd’hui et elle tiendrait sa parole. Elle s’empare ensuite de quelques jetons, saute de la chaise du bar et attrape son verre :

- Très bien, commençons par le basket, je ne veux pas t’écraser dès le premier jeu.

Elle lui fit un sourire malicieux, Noriko était une mauvaise perdante, même si elle se savait pas la plus douée au jeu de basket, elle se donnerait à fond, s’imaginant être capable de battre la taille et la vitesse de Daryl. Elle trouve les arcades avec le panier de basket, elle insère quelques jetons et des ballons lui sont fournis, il y a deux machines, elle met donc d’autres jetons dans la seconde pour que Daryl puisse lui aussi jouer en même temps. Elle boit une gorgée de son verre et le pose sur le bord de l’arcade.

- À 3 on y va, 1, 2…

Et elle commença à envoyer avant d’avoir atteint le 3 pour devancer Daryl, pas que ça changerait quoi que ce soit au score, elle rate plusieurs paniers, le basket n’étant clairement pas son point fort. Un peu essoufflée à la fin de sa partie, elle check leur score… Il a gagné… Elle se retient de bouder, elle n’avait pas dit son dernier mot. Elle eut une idée pour rajouter du piment à leurs parties :

- Et si on pariait ? Celui ou celle qui gagne le plus de partie aujourd’hui, doit faire quelque chose que l’autre lui demande ?

La curiosité journalistique, presque maladive d’une rédactrice est bien l’une des rares caractéristiques que Daryl déteste chez une femme. Sans doute aurait-il dû éviter d’inviter cette jeune femme, bien que son profil et ses photos soient plus que captivantes, elle pourrait mettre sa carrière en danger. C’est dans de pareilles circonstances que l’acteur voudrait se gifler, parce que sa solitude n’excuse pas les prises de risques inutiles. « Aujourd’hui, pas de célébrité et pas de journaliste. » Un sourire se dessine sur le visage du quadragénaire, bien qu’il ne soit pas complètement rassuré, les chroniqueurs ne sont pas connus pour être des personnes honnêtes.  

—  Ravi de l’entendre, j’apprécie déjà ta compagnie mais elle me serait encore plus agréable sans la crainte d’être à la une des journaux.  

Certes il l’aurait bien cherché, mais jouer avec le feu est l’un des passe-temps de Daryl, après tout c’est aussi pour cette raison qu’il se drogue. Son immaturité lui vaudra bien un mauvais karma un jour ou l’autre, mais pour l’heure il préfère profiter du moment présent.  

À contrario de son date, l’acteur lui, a le gabarit parfait pour supporter un pourcentage élevé d’alcool et ne nous voilons pas la face, une grande expérience dans le domaine également. Pour autant il n’allait pas abuser de la boisson aujourd’hui, s’il veut paraître le plus soigneux possible devant la journaliste, se prendre une cuite dès le premier rendez-vous n’était pas la plus judicieuse des idées. « Merci d’offrir à boire et les jeux. » Même s’il n’avait pas été millionnaire, le quadragénaire aurait offert sa journée à la dame, déjà parce que, bien que la modernité veuille un partage égal, lui est plutôt du genre vieille école. C’est à l’homme de payer point barre...surtout lorsque l’homme en question est fortuné.  

— Oh de rien, c’est normal. On ne dirait pas mais ce genre d’endroit est addictif, j’en ai perdu du fric dans ma vingtaine avec ses machines là ! S’amuse-t-il.

Un peu comme dans les foires avec leurs grues attrape-peluches, leurs propriétaires sont bien malins, il faut le reconnaître. Cette arnaque mise de côté, Daryl pose une question personnelle...trop personnelle ? Ça en a tout l’air en tout cas. « Je suis amie avec une des Fujiwara, ceux qui ont les hôtels de luxe en ville, ils m’ont parlé de Klamath Falls, de l’Oregon et puis, j’avais besoin de partir et faire profil bas, donc me voilà. Et toi ? Promis, c’est pas pour m’en servir dans un article. » Partir et faire profil bas, tiens donc, en voilà une réflexion bien mystérieuse ! Visiblement mal à l’aise, la jeune femme n’en dit pas plus, lui retourne la question sans doute pour faire diversion. Bien qu’en étant conscient, Daryl ne cherche pas à en savoir davantage, chacun son jardin secret, d’autant que lui en avait un de la taille du ranch de Neverland et il ne voudrait pas non plus lui en laisser le libre accès.  

— Je vois, et tu t’y plais finalement ? Questionne-t-il avant de poursuivre après une gorgée de cocktail. Moi j’avais d’abord pensé déménager à Honolulu, mais ça n’aurait pas été pratique avec mon job, puis je me suis souvenu d’une petite ville dans laquelle j’avais tourné une sitcom dans ma jeunesse, j’avais bien aimé le fait qu’elle soit différente de New-York alors, me voilà !  

Tout comme elle, Daryl omettait bien des détails. S’il s’était expatrié de la grosse pomme pour Klamath Falls, c’était plutôt pour s’éloigner de ses viles tentations. À New-York ses week-end se résumaient à l’alcool, la drogue et le sexe, une vie de débauche dont il est difficile de se détacher. Alors pour avoir meilleure réputation, déménager dans une plus petite ville était nécessaire. S’il avait su qu’ici résidait une certaine Scandale amatrice de potins en tout genre, peut-être se serait-il abstenu d’y acheter une villa. « Très bien, commençons par le basket, je ne veux pas t’écraser dès le premier jeu. » Effectivement, sans vouloir être méprisant, elle avait peu de chance de gagner au basket, non pas qu’il soit particulièrement doué dans ce sport, mais son gabarit l’avantage de loin, surtout comparé à celui de Noriko. « À 3 on y va, 1, 2…» Sans grande difficulté, le quadragénaire enchaîne les paniers, avec sa taille, rien que tendre le bras lui permettait presque de faire un slam dunk alors rien d’étonnant à ce qu’il gagne la partie, pour autant il n’en garde pas grande satisfaction. « Et si on pariait ? Celui ou celle qui gagne le plus de partie aujourd’hui, doit faire quelque chose que l’autre lui demande ? » Une joueuse, pile le genre de femme qu’il aime ! Un challenge pimente toujours le jeu, et Daryl n’est pas du genre à se défiler.

— Ça me va, tant que ça ne nuit pas à ma carrière, je fais ce que tu veux ! Il boit une gorgée de sa boisson, dépose le verre sans trop de délicatesse sur la table –son côté un peu rustre- et poursuit. Par contre on oublie la basket, j’ai aucun mérite avec mon mètre quatre-vingt-douze ! Ce qui serait plus équitable c’est le Air hockey ou Dance dance revolution, là tu as toutes tes chances, je suis très mauvais danseur.