Gagné perdu - Jo

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Il sait qu’il ne devrait pas être là. Assit à l’avant de sa voiture, mains encore sur le volant. Il guette l’immeuble qui se dresse devant lui. Celui où vit Josephine. Il devrait réenclencher son moteur, et partir vers le loft d’Erika. Elle est revenue d’Italie, et il n’a même pas eu le temps de la voir encore. C’est là que serait son devoir de bon petit-copain, comme qui dirait. Mais il est là, au pieds du bâtiment de Jo, à se battre avec ses démons intérieurs. Et son téléphone bip, lui annonçant un nouveau message. Ça le force à détacher ses yeux des briques rouges, pour lire le texto. Erika qui lui demande ce qu’il fait ce soir. Il n’aime pas ce qu’il écrit. C’est pas totalement mensonger, c’est vrai qu’il y va pour des problèmes. Mais y’aura pas Iza. Contrairement à ce qu’il envoie. Y’aura que lui et Jo. Parce que Jo s’est imaginée des choses, des choses qu’il a il faut bien le reconnaître, apprécié sous-entendre. Et qu’il sait clairement plus ou il en est. Faudrait pas qu’il se laisse aveuglé par la fraicheur de Jo. Mais d’un autre côté, s’il est attaché à Erika, il voit bien qu’entre eux ça va vite se compliquer. Entre leurs modes de vies si contradictoires, et surtout, Hernandez. Il se rend bien compte qu’ils se sont rapprochés l’un de l’autre, pour combler le vide de leur histoire avec Lizzie. Et il ne sait plus très bien ou tout ça va les mener. Pour autant, il ne veut pas faire un pas de travers. Alors il est là, sans savoir ce qu’il fout vraiment ici. Ce qu’il va pouvoir dire... Et il peste intérieurement, coupant finalement le réseau de son téléphone, qu’il met en mode avion. Erika ne cessera de lui écrire, il le sait. Et il n’a pas envie de lui mentir.

Il fourre l’appareil dans la poche de son jean, puis il se décide enfin à sortir de sa voiture. Il avait comme la sensation d’être terriblement stupide, de s’angoisser comme ça. Il devrait pas. Les choses sont assez simples. Il a Erika, il est posé, Jo devrait s’en faire une raison. Pourtant non, dans sa tête, c’était loin d’être aussi simple. Et ça compliquait les choses, ses sentiments, et ses réactions. Ce stresse, cette sensation d’être face à une décision qu’il ne pouvait pas prendre. Ou qu’il ne voulait pas prendre. Il a déjà vécu ça, d’être pris entre deux filles. Il avait 19 ans, était avec Drew, et n’a rien trouvé de mieux à faire que d’en embrasser une autre le soir du bal de fin d’année, brisant et perdant Drew pour toujours. Et ça il ne se l’est jamais vraiment pardonné...

Qu’est-ce qu’il va dire ? Qu’est-ce qu’il va faire ? Les semelles de ses chaussures frottent le béton, alors qu’il fixe au loin la porte de l’immeuble. Il ignore encore bien ce qui va sortir d’entre ses lèvres. Sûrement de la connerie, encore. De la maladresse. Son cœur se serre dans sa poitrine, puis tambourine. Angoisse, incapacité à réfléchir correctement. Doute, questionnements. Y’a comme un énorme bruit sourd dans ses oreilles.

Et il passe la porte. Il sait bien ou elle vit Jo. Leurs soirées sont toujours chez elle, ou chez Iza, qui n’habite pas loin d’ailleurs. Alors il n’a pas besoin de chercher, ses jambes montent les escaliers deux par deux, mécaniquement. Parce qu’il est ailleurs, dans ses esprits. Il essai d’y voir plus clair, mais plus il réfléchit et plus ça se mélange. Plus y’a plus rien de clair. Plus rien de sensé.

Et il fait face à la porte de Jo. Porte qu’il fixe un long moment, la respiration difficile. Il est déjà presque 21h. C’est en ayant cette impression de tic-tac incessant dans le crâne, qu’il finit par appuyer sur le bouton de la sonnette. Et quand son doigt se retire, il vient passer nerveusement ses cinq dans ses cheveux blonds, 90th look.

Des pas derrière la porte, puis le cliquetis. Et enfin, le visage de Jo qu’apparait. Ca lui coupe l’espace d’un instant, la respiration. Il se dit que c’est sûrement le stress, le manque de temps pour réfléchir à ce qu’il allait dire. Alors il reste quelques secondes immobiles, si ce n’est son bras qui retombe le long de son corps. Ses yeux qui fixent ce visage, les traits du sien si perdus.

_ “ Salut. “

Qu’il finit par souffler, manquant d’oxygène. Rien de mieux qui sort de sa bouche. Alors ses yeux tombent sur la silhouette de Jo, qui porte une robe visiblement destinée à une sortie. Il en ouvre les lèvres, rivé sur cette jolie silhouette, sans trop s’en rendre compte. Il lui faut bien deux secondes avant qu’il ne relève les yeux, et vienne se frotter la nuque comme mal à l’aise.

_ “ Désolé, je voulais pas... T’empêcher de sortir. Tu... J’repasserais. “

Qu’il bredouille, finissant par pincer les lèvres et reculant d’un pas.

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Josephine se sentait stupide, absolument stupide. Elle qui avait prévu de sortir avec son frère et ses amis - dont Tom - se retrouvait chez elle, à attendre l'éventuelle venue de celui qui était la cause de toutes ses sorties et gueules de bois depuis une semaine. Si on lui avait dit, quelques heures avant, qu'elle reporterait sa soirée juste pour se retrouver nerveuse, assise sur son canapé, elle ne l'aurait jamais cru. Et pourtant, Izaline avait su la convaincre - il avait toujours été difficile de dire non à Iza.

Elle était assise dans son salon, trop bien habillée pour une nuit à poireauter chez soi. Elle avait mis sa robe noire favorite, qui lui allait très bien et qui était parfaite pour danser durant de longues heures - et, en général, qui l'aidait à rentrer accompagnée. Ses talons aiguilles dorés attendaient sagement d'être chaussés dans l'entrée, tout comme son petit sac de la même couleur dans laquelle elle avait mis l'essentiel pour la soirée : carte bleue, batterie externe, rouge à lèvre. Son téléphone, lui, se trouvait dans ses mains.

Elle était retournée sur sa conversation avec Ricky, se demandant s'il allait lui envoyer un message, relisant leurs messages précédents, essayant de comprendre ce qui se passait entre eux, tandis qu'Izaline lui envoyait des messages pour la réconforter. Elle s'était donnée une heure limite, heure à partir de laquelle elle oublierait définitivement tout ce qui s'était passé et aurait pu se passer avec Ricky, et irait rejoindre les autres pour faire la fête. Même s'il venait - ce dont elle doutait fortement - qu'allaient-ils se dire ? Il était en couple. Elle avait au départ juste voulu s'amuser avec lui, suite à la demande d'Izaline de le distraire un peu pour qu'il ne voit pas ce qu'il se passait dans la vie sentimentale de sa nièce. Elle n'aurait pas su dire quand exactement, mais Josephine avait fini par se faire avoir à son propre jeu. Et elle détestait ça. Cela faisait quelques années qu'elle ne voulait plus s'attacher, recherchant toujours des hommes avec lesquels s'amuser, mais rien de sérieux, et voilà qu'elle se mettait à penser à Ricky plus que de raison, lui qui était déjà en couple, et pas un modèle de stabilité non plus. C'était peut-être ça qui l'attirait. Ils étaient deux tempêtes instables, qui s'attiraient et se repoussaient en permanence.

Elle s'était levée, ne sachant que faire d'elle, et s'était mise à faire les 100 pas pieds nus sur son tapis. Que faire ? Elle avait dit à Izaline qu'elle attendrait, mais sa fierté ne supporterait pas d'attendre pour rien. Histoire de s'occuper, elle but un verre d'eau, alla dans la salle de bain rectifier son maquillage, et se parfumer un peu - le jasmin avait toujours été son meilleur allié. Retour dans le salon, retour des 100 pas. Puis, ne pouvant plus supporter cette attente, une décision : tant pis pour Ricky qui était très certainement avec Erika à l'heure qu'il était. Josephine décidait de se choisir, elle. Elle partait.

Assise dans le tabouret de l'entrée, elle enfila ses talons et sortit son téléphone pour prévenir Iza.  "Désolée, je tiens plus. Je sors, tant pis." Son pouce était en train de se rapprocher du bouton envoyer, quand on toqua à la porte. Son coeur rata un battement, et elle se leva en ayant l'impression de ne plus rien contrôler. Ca n'était peut-être pas lui, peut-être était-ce Izaline passant pour voir comment elle allait, ou un voisin qui avait besoin de beurre, de sel, ou autre ?

Elle prit son sac et chercha ses clefs pour ouvrir la porte, essayant de calmer le tremblement qui s'était emparé de ses mains. Clefs trouvées, elle les fit tourner dans la serrure dans un moment qui lui sembla durer une éternité, avant d'ouvrir la porte.

Il était venu. Ricky se trouvait devant elle, toujours aussi beau, semblant un peu perdu aussi, et Josephine dut se battre pour retrouver ses esprits. Il était venu, certes, mais ça ne voulait rien dire. Du moins, c'était ce qu'elle essayait de se dire. Elle ne savait pas ce qu'Izaline avait dit à Ricky à propos d'elle, et elle redoutait de le savoir. Il allait falloir qu'elle la joue aussi indifférente et détendue que possible, mais pour le moment c'était mal parti.

Elle sentit toutes ses résolutions s'envoler quand il parla. Un simple salut, mais si doux qu'il désempara immédiatement Josephine.

-  " Salut. "

Elle se tenait dans l'encadrement de la porte, se demandant s'il allait continuer ou juste tourner les talons. Devrait-elle le laisser rentrer ? Elle ne voulait pas qu'il sache qu'elle l'attendait depuis des heures. Heureusement pour elle, il reprit la parole, lui laissant un peu de temps pour réfléchir à ce qu'elle allait dire.

Il pensait qu'il la dérangeait. Elle comprenait : il n'avait pas prévenu, il se faisait tard, et elle était en tenue de soirée, les talons enfilés et le sac à la main. Elle aurait dû lui dire qu'en effet, elle avait des plans, et qu'elle ne pouvait pas rester.

-  " J'allais sortir rejoindre des amis, mais j'ai un peu de temps devant moi... Tu veux rentrer ? "

Etait-ce une bonne idée ? Josephine n'en savait rien, elle se sentait confuse et avait l'impression que ses jambes allaient lâcher. Toujours est-il qu'elle se poussa de l'encadrure pour que Ricky puisse passer et rentrer dans le salon. Pas besoin de lui indiquer le chemin, il était déjà venu, quand les choses étaient plus simples.

-  " Tout va bien ? Tu veux boire quelque chose ? "  

Elle mourait d'envie de lui demander ce qu'il faisait là, mais elle avait aussi peur d'être confrontée à ce qu'il allait lui dire : il n'y avait rien entre eux, elle s'était imaginé des choses, il était en couple, aimait et ne voyait qu'Erika. Elle se préparait déjà mentalement à jouer la surprise et l'innocence à la perfection, lui disait qu'il se méprenait, que Ricky et elle n'étaient que des amis, qu'elle n'y avait jamais rien vu ni désiré de plus. Toujours en talons, elle s'installa dans le fauteuil qui faisait face au canapé, laissant ce dernier à Ricky afin de mettre le plus de distance possible entre eux.

Elle ne savait que faire en attendant que la sentence tombe, scrutant son visage à la recherche d'un signe, de quoi que ce soit, tout en essayant de ne pas se perdre dans son regard qui la faisait chavirer, même si elle détestait le reconnaître. Elle se mit à triturer le bracelet de sa mère qui ne la quittait jamais, pensant que s'occuper les mains la calmerait peut-être.

Peu importe ce qui était sur le point de se passer, Josephine sentait que rien ne serait plus jamais pareil entre Ricky et elle. Ils avaient trop joué, avaient trop laissé s'installer entre eux une tension, une attirance, qui finissait par lui exploser au visage.

-  " Ca fait un bail. "  

Elle avait dit ça juste pour combler le vide. Eux qui avaient eu un moment où ils n'avaient pas arrêté de s'envoyer des sms ne s'étaient plus parlés depuis quelques jours, et leur conversation avait fini de manière très surprenante et frustrante pour Josephine. Il s'était montré jaloux, et avait refusé de répondre quand elle avait essayé d'en savoir un peu plus, la laissant absolument perdue dans ses sentiments, évènement faisant qu'elle ne pouvait s'empêcher de garder en elle un espoir, certes ténu, mais bien présent néanmoins.

 

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Ils se toisent un instant, probablement gênés l’un comme l’autre. Elle le salut pourtant, aussi doucement que lui, aussi incertaine que lui. La tension et l’angoisse sont sûrement bien palpables. Et au final, il tente de fuir, profitant des airs de soirées de Joséphine. Robe soignée, talons aiguilles. Maquillage à paillette. Il dérange sûrement. Ses yeux tentent de fuir la jolie image qu’elle lui offre, mais ils en reviennent sans arrêt. Jo est toujours très jolie. Visage de poupée, même particulièrement enfantin. Mais ce soir encore plus, comme à chaque fois qu’elle se pare pour une soirée. “ J'allais sortir rejoindre des amis, mais j'ai un peu de temps devant moi... Tu veux rentrer ? “ Il inspire difficilement, la respiration saccadée. Il se tourne vers les escaliers de l’immeuble, comme si l’envie de les prendre en courant était des plus tentante. Mais il se doit de causer avec Jo, Izaline a raison. Fuir les problèmes comme il le fait n’a jamais réglé la situation, et ne la réglera jamais. Alors il hoche la tête de haut en bas, bien qu’hésitant. Et tandis qu’elle s’écarte, il fuit les yeux de la blondinette pour s’aventurer chez elle. Passant devant sa petite silhouette. Il connait le chemin, il connait l’appartement. Pourtant c’était comme être en territoire inconnue. “ Tout va bien ? Tu veux boire quelque chose ? “ Il commence par encore hocher la tête, positivement, puis négativement. Les réponses suivent les questions dans l’ordre, mais semblent se contredire exactement comme toutes ses pensées actuellement.

Machinalement, il se dirige vers le salon, frottant nerveusement ses mains contre son jean. Il essai de rassembler ses pensées, les choses qu’il doit dire. Mais c’est très confus dans sa tête. Lui-même n’étant guère certain de ce qu’il a envie. Il est bien avec Erika et pourtant, il sait aussi qu’autour d’eux, y’a pas grand-chose qui va. Deux mondes différents, et un Italien qui prend beaucoup trop de place. Et Jo, y’a quelque chose il ne peut pas le nier. Mais il ne sait même pas quoi. Elle lui plait, sûrement. Mais il n’a pas envie d’être ce genre de gars qui joue sur deux tableaux. Surtout que n’étant ainsi pas certain de ce qu’il veut dans son histoire actuelle, c’était pas le moment de s’en rajouter des emmerdes. Emmerdes qui sont néanmoins déjà dans sa tête. Jo a semé le doute, ou plutôt, l’a enfoncé, là où il était déjà en équilibre. Douter de son avenir avec une fille, alors qu’une autre pointe le bout de son nez, c’est jamais bon. C’est dans ce trop-plein de questionnements internes qu’il s’assoit sur le canapé. Les paumes et les doigts contre son jean. Discrètement il suit du coin de l’œil la blonde, qui elle, prend place dans le fauteuil, comme si elle cherchait à imposer une certaine distance entre eux. Clairement pas dans ses habitudes. Alors malgré un regard fuyant, il observe la blonde, les mots au bout des lèvres. Il ne sait pas trop par où commencer. Surtout que le fond du malaise, il est pas sensé le connaître. C’est Izaline qui lui a fait un peu trop de confidences. Bavant les secrets que Jo lui a confié, bafouant peut-être même sa confiance. Et se mettre entre les deux gamines, c’était bien la dernière chose qu’il voulait lui. “ Ca fait un bail. “ Elle brise le silence, il hoche une nouvelle fois la tête, alors qu’un très léger sourire étire le coin de ses lèvres, à peine visible. Trop en crispation pour que ce soit plus franc.

_ “ Ouai... Désolé. “

Qu’il marmonne, avant de venir reposer ses mains sur le bord du canapé, autour de ses cuisses. Le regard s’arrêtant enfin sur Josephine, incertain, mais bien arrêté.

_ “ J’suis... Vraiment désolé pour ma réaction l’autre fois. C’était débile. J’voulais pas que tu te fasses des idées ou... Ou j’sais pas, c’était complètement con, j’me suis pas contrôlé. “

Ça s’appelle plus littéralement, avoir le cul entre deux chaises. Deux femmes dans la tête. L’officielle et l’officieuse. Mais lui, il n’a pas envie d’assumer ça. Il n’a pas envie d’être de ces hommes, qui ont une vie au soleil, et une dans l’ombre. Il n’est pas là non plus pour la rejeter, loin de là. Simplement pour mettre cartes sur table. Tenter de lui expliquer son ressenti peut-être. C’est même pas clair pour lui-même.

_ “ J’ai eu une espèce... De jalousie mal placée. C’était mal venu. “

Surtout de la part d’un gars maqué. Il détourne les yeux à contre-cœur, pinçant l’intérieur de sa bouche entre ses dents, nerveusement. L’une de ses mains part dans sa chevelure blonde, la replace en arrière, puis elle retombe sur le sofa qu’il sert légèrement de ses doigts, juste au bord.

_ “ Et mal envers toi. Tu fais s’que tu veux, si tu veux voir ce gars là... “

Pourtant ses doigts s’enfoncent un peu plus dans le canapé, pour gérer et ravaler sa jalousie qu’il ne comprend même pas lui-même.  

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Josephine n'aimait pas ce qui était en train de se passer. Depuis qu'elle s'était aperçue que Ricky l'attirait plus que de raison, elle était toujours un peu mal à l'aise en sa présence, mais ce soir-là était pire que tout. Elle savait qu'il savait, désormais. Izaline lui en avait parlé. D'ordinaire, elle avait toujours confiance en ce que faisait sa meilleure amie, mais ce soir-là Josephine doutait sérieusement. Elle avait juste l'impression qu'elle allait passer un très mauvais moment. Et pourtant, l'expression sur le visage de Ricky était douce, elle n'avait pas l'impression qu'il était en colère. Il était là, au milieu de son salon, sûrement pour lui dire d'arrêter de se faire des idées, et la seule pensée qui lui traversait la tête, obsédante, était qu'elle le trouvait beau. Une quarantaine qui lui allait bien, des cheveux savamment coiffés-décoiffés - elle avait toujours eu un faible pour les blonds...

Elle aimait bien le voir là, sur son canapé, vêtu d'une chemise qui lui allait très bien. Si le contexte avait été différent, elle se serait peut-être assise plus près de lui, comme ils l'avaient déjà fait lors de certaines soirées, l'alcool aidant.

Il finit par prendre la parole, et Josephine sentit son coeur s'arrêter quelques instants. Il s'excusait d'avoir mal réagi lors de leur conversation SMS qui bouclait dans la tête de Josephine, la jalousie de Ricky puis sa fuite. Il semblait vouloir lui dire qu'il n'y avait rien derrière tout ça, mais ses dernières mots interpellèrent la jeune femme. Comment ça, il ne s'était pas contrôlé ? Qu'est-ce que ça voulait dire ? Se contrôlait-il, au moment même où il lui disait tout ça ? Qu'arriverait-il s'il cessait à nouveau de se contrôler.

Des images traversèrent la tête de Josephine en un flash, et elle se redressa sur sa chaise, essayant de chasser toutes ces pensées qui venaient polluer un moment sérieux. La surprise la rendait muette, elle attendit qu'il continue. Il parla de jalousie, et Josephine fut alors définitivement convaincue qu'elle n'avait pas qu'imaginé que quelque chose se passait entre eux ; il le sentait aussi.

Elle s'était attendue à tout sauf à ça. Il l'encourageait à voir ce garçon dont Izaline lui avait parlé si elle le voulait, garçon dont Josephine, qui pensait de plus en plus à Ricky, avait déjà oublié le nom. Elle était pleine de sentiments contradictoires : Ricky était là pour mettre les choses aux claires entre eux, et pourtant la seule chose qu'elle comprenait, c'est qu'il n'y arrivait pas parce que lui aussi la désirait. Elle jouait nerveusement avec sa bague, étant consciente que c'était à elle de parler.

Elle se leva, n'y tenant plus, et se mis à faire les cents pas, essayant de trouver les bons mots, luttant entre ce que sa raison lui dictait et ce que son coeur hurlait. Elle devait le convaincre qu'elle ne ressentait rien pour lui, qu'ils n'étaient qu'amis, et qu'il pouvait rentrer le coeur en paix auprès d'Erika. Elle voulait le sentir dans ses bras, sentir son odeur, se laisser embrasser.

Elle se passa la main dans les cheveux, consciente d'avoir l'air agitée.

- Je ne sais pas quoi te dire. J'avais prévu de faire la parfaite ingénue, mais je ne vais pas y arriver... Je ne veux pas spécialement le revoir. Ni lui, ni celui que je vois depuis une semaine, qui m'attend en ce moment même. Et pourtant, s'il le faut, je les verrai, je ferai des sorties avec, j'accepterai de me laisser séduire, si ça me permet de t'oublier. Mais pour le moment, je n'y arrive pas.

Voilà. Elle l'avait dit. Au final, ça avait été comme enlever un pansement : ça avait été douloureux une seconde, mais au moins elle était libre maintenant, un poids énorme s'était ôté de ses épaules. Elle aurait trouvé insupportable qu'ils tournent autour du pot des heures durant, avant de se quitter sur un non-dit. Au moins, il savait l'abcès était crevé, et la balle était entre les mains de Ricky.

Elle se stoppa face à lui, soupirant, osant enfin le regarder dans les yeux. Ses bras se croisèrent, soudain consciente de la position vulnérable dans laquelle elle venait de se mettre, et du fait qu'elle s'était un peu rapprochée de lui lors de ses allers et retours.

- Désolée. Crois-moi, j'essaie. Je comprendrais si tu voulais...

Elle se mordit la lèvre, s'interrompant. Elle avait voulu dire "si tu voulais partir et couper les ponts", mais Josephine avait peur, trop peur qu'il se lève sans un mot, tourne les talons, et qu'elle ne le revoit jamais. Son estomac se tordit à cette pensée. Toutefois, quoi qu'il arrive, elle ne pleurerait pas. Il était hors de question qu'elle se mette dans des états pareils pour un homme déjà en couple. Même s'il avait traversé la ville pour arriver chez elle, et qu'il la regardait comme Ricky le faisait. Cela rendait cependant la chose plus difficile.

Son téléphone vibra sur la table, et Josephine vit le nom de Tom s'afficher sur l'écran. Elle décida de l'ignorer, ce n'était pas le moment. Cinq vibrations, puis l'écran du téléphone s'éteint, laissant à nouveau Ricky et Josephine face à face, dans une salle qui semblait devenir de plus en plus petite autour d'eux, avec une tension si présente qu'elle en devenait presque matérielle.

Les secondes qui suivirent parurent durent des heures pour Josephine, qui attendait un signe, n'importe quoi, pour la convaincre d'oublier définitivement Ricky.


 

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Il était tendu Ricky, surtout quand il ferme sa bouche, que le son de sa voix s’éteint. Encore plus tendu quand Josephine se lève, et commence à faire les cent pas dans la pièce. Il la suit des yeux, son visage prend la même direction qu’elle. Puis s’arrête, toujours vers elle, alors qu’elle se pose, et passe sa main dans ses cheveux. Mignonne petite poupée. Il se flagelle intérieurement de le penser, et les traits de son visage semblent inquiets, ou attristés. Parce qu’il est paumé. Il ne sait plus très bien ce qu’il veut, ni où il va. Erika et leurs problèmes. Josephine. Y’avait aucun chemin qui lui semblait convenable. La seule chose dont il était sûr, c’est que malgré qu’il ait une putain de mannequin dans sa vie, qui comblerait tous les hommes de la terre, il pense un peu trop à une autre. Une autre pourtant bien trop jeune. Une autre avec qui ça ne se passerait peut-être pas mieux, parce que y’a finalement un fossé générationnel entre eux. Mais il n’est là, plus qu’un morceau de ferraille, et Josephine, elle est un putain d’aimant. “ Je ne sais pas quoi te dire. J'avais prévu de faire la parfaite ingénue, […] Mais pour le moment, je n'y arrive pas. “ Elle débite un bon monologue la gamine, alors qu’il reste rivé sur elle, de plus en plus désolé sur le visage. Tout ça c’est un peu de sa faute. Il aurait mieux fait de ne pas rentrer dans son jeu. Il a pourtant longtemps essayé, de resté détaché. Mais la situation lui a échappé. Comme c’est souvent le cas d’ailleurs, parce que Ricky ne sait jamais imposer des limites, dans n’importe quel domaine. Elle s’avance finalement quelque peu vers lui, alors il se redresse, le dos droit. Il ne fuit pas vraiment le regard de Josephine, bien que pourtant, au fond de lui, la fuite lui semblait attirante. Il veut simplement assumer la situation, aussi difficile soit-elle. “ Désolée. Crois-moi, j'essaie. Je comprendrais si tu voulais... “ Enfonçant un peu plus ses yeux dans les siens, il hausse les sourcils, attendant la fin de la phrase qui ne vient pas. S’il voulait quoi ? Il n’a pas le temps de demander, ils sont coupés dans leur étrange moment, par le téléphone de Jo qui vibre sur la table basse. Il casse leur échange pour poser instinctivement ses yeux sur le téléphone. Il ne lui faut pas longtemps pour comprendre que le “Tom” affiché sur l’écran, doit certainement être le garçon dont elle parle. Celui avec qui elle a rendez-vous. Il passe alors ses yeux du portable à Jo, puis l’inverse. Et en revient à Jo, alors que la dernière vibration se fait entendre.  

_ “ Tu réponds pas ? “

Qu’il murmure, la voix enraillée, le visage relevé vers Josephine, plus grande que lui à se tenir debout comme ça. Ce qui le “stresse” assez pour que finalement, après avoir frotter deux fois le jean sur ses cuisses, il se hisse et se lève du canapé, pour que ce soit à lui de prendre Jo de haut, maintenant face à elle a si peu de distance. Trop peut-être encore. Et pourtant pas assez pour que ce soit respectable.  

_ “ C’est ton rencard ? “

Qu’il finit par demander, l’angoisse toujours palpable dans le son de sa voix.  

_ “ Il va attendre... “

Qu’il ajoute, comme si ça le gênait de gâcher la soirée d’un autre type. Alors que clairement, il n’en n’avait rien à foutre, et préférait égoïstement l’idée qu’elle lui foute un lapin. Parce que non, il ne comptait pas partir avant d’avoir éclaircit la situation. Bien que dans tous les cas elle ne sera probablement jamais totalement éclaircie, vu que la situation est plus que compliquée.  S’en suit encore un long silence, à se toiser. La respiration difficile, la sécheresse dans la gorge. Et c’est lui qui fend enfin le silence, après de longues secondes :  

_ “ J’comprends pas la situation. J’sais pas où j’en suis moi. “

Qu’il avoue presque en chuchotant, tant la voix lui manque. Si y’avait pas Erika dans sa vie, il se serait déjà un peu plus approché, et il aurait même certainement déjà tenté sa chance dans un baiser volé. Il ne se serait peut-être posé aucune question sur leur différence d’âge, sur rien. Il aurait tenté. Mais là, il est déchiré entre deux femmes, et il n’aime pas ça. Il a le réflexe d’avancer sa main, vers celle de Josephine, mais avant même de la rencontrer, il la recule, réalisant son geste stupide. Il coince aussitôt sa main derrière sa cuisse, s’empêchant tout contact avec elle.

_ “ Mais j’veux pas que tu crois... “

Il inspire un bon coup, relevant les yeux vers le plafond, fuyant finalement ceux de la blondinette.

_ “ Que j’te largue ou j’sais pas quoi... “

Par larguer, il entend “mettre de côté” après tous les délires qu’ils ont pu avoir, lors de soirées ou leurs sms douteux. Il la jette pas après usage, non. Il comprend juste pas ce qui lui arrive. Il a besoin de faire le point.

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Josephine, qui était dans l'attente d'un signe, de quoi que ce soit qui lui ferait comprendre qu'il était temps d'oublier Ricky, aurait pu considérer l'appel de Tom à ce moment-là comme le dit signe. Pourtant, elle ne bougea pas, ne sentant pour la première fois depuis qu'elle l'avait rencontré aucune envie de lui parler. Pourtant il l'attendait, elle le savait, comme plusieurs soirs depuis une semaine, des soirées à faire la fête ensemble et à finir la nuit tous les deux. Peut-être commençait-il à s'attacher à elle, elle qui n'avait eu que Ricky en tête tout ce temps-là, ce qui l'avait encore plus poussée à sortir, à s'amuser, à passer du temps avec Tom. Un cercle infernal.

Le téléphone finit par s'arrêter de vibrer, sans que Josephine n'ait esquissé le moindre geste en sa direction. Elle sentait chaque fibre de son corps être attirée vers Ricky, et elle se demandait si c'était réciproque. Il lui demanda si elle ne répondait pas, question purement rhétorique, elle le savait. Elle comptait cependant lui répondre, mais fut décontenancée quand elle vit Ricky se lever, diminuant encore la proximité entre eux. Elle en eut le souffle coupé un instant, oubliant ce qu'elle était sur le point de dire, décroisant ses bras sans même s'en rendre compte. Un pas, un geste, et ils se frôleraient, brisant l'interdit. Elle sentait le piège petit à petit se refermer sur elle, tandis qu'il lui demandait si l'appel venait de son rencard.

- Oui. On s'est déjà vus plusieurs fois cette semaine... Et oui. Il va attendre. C'est toi qui est là devant moi, pas lui.

Et c'était Ricky que Josephine désirait, pas Tom. Mais ça, elle ne lui dirait pas à voix haute, elle savait qu'elle en avait déjà trop dit. Ils se devaient de régler tout ce qu'il leur restait à régler, si possible en laissant le plus d'espace possible entre eux - ce qui était, pour le moment, mal parti. Il lui avoua être perdu, ce que Josephine avait compris depuis plusieurs jours via son attitude. Elle vit qu'il fuyait de plus en plus son regard, ce qui l'attrista. De l'autre côté, elle comprenait : Josephine n'était pas celle dont il partageait la vie.

Sans même y réfléchir, elle tendit la main vers Ricky, la posant doucement sur sa joue pour diriger son regard vers elle. Son but était qu'il la regarde, qu'ils se parlent sans fuite, mais elle ne se rendit compte qu'après que ce geste les avait encore rapprochés, que leurs corps commençaient à se toucher. Venait-elle de les condamner ? Tentative de parler normalement, la voix rendue un peu rauque mais douce par toutes les émotions qui l'envahissent, elle parla, se demandant comment réussir à enlever sa main, alors qu'elle ne rêvait que de plus.

-  Moi aussi. J'ai du mal à comprendre tout ce qu'il se passe, comment gérer. Et... j'ai peur.

Cela avait été très difficile de l'avouer, mais il fallait qu'il le sache. Leurs regards se croisèrent, enfin et Josephine enleva doucement sa main, sans pour autant se reculer. Elle savait qu'elle aurait dû, mais elle s'en sentait incapable. Elle voulait qu'il la voit.

Ils étaient si proches que Josephine en avait légèrement le vertige, elle savait qu'elle était en train de dépasser une limite. Comment tout cela allait-il finir ?

-  Je ne crois rien du tout. On est pas ensemble, tu ne peux pas me larguer.

Tu ne peux pas me faire de mal. Cette pensée lui traversa l'esprit, mais elle savait que c'était faux. C'était tout à fait ce qu'il risquait d'arriver, vu le bourbier dans lequel elle s'était empêtrée. Au fond, elle allait se faire du mal à elle-même avec cette histoire. Elle qui ne voulait jamais s'attacher aux garçons qu'elle rencontrait pour ne pas souffrir au cas où ça finirait mal était pourtant tombée la tête la première dans la gueule du loup. C'était pour ça qu'elle avait tenu à ce que Ricky la regarde dans les yeux ; pour qu'elle puisse voir le rejet, peut-être un air désolé, en bref qu'elle comprenne qu'elle n'avait aucune chance, qu'elle recule. Mais elle ne vit rien de tout cela, bien au contraire. Alors, elle resta là, trop proche de Ricky pour une simple amie, sur le fil en équilibre fragile, menaçant de la faire tomber à chaque instant d'un côté ou de l'autre. Si rien ne se passait, elle reculerait.

-  Je ne veux pas te retenir si tu veux partir.

Reste.


 

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“ Oui. On s'est déjà vus plusieurs fois cette semaine... Et oui. Il va attendre. C'est toi qui es là devant moi, pas lui. “ Pourtant il ne devrait pas. Il ne devrait pas être là. Ce qui le raidi quelque peu, alors qu’il fait face à Josephine, plus grand, plus imposant. Et pourtant, si peu assuré. Les sourcils retombant d’inquiétude, de doutes. Il n’ose guère répondre. Il sait que ce serait mal venu, sa place n’étant officiellement pas ici. Officieusement, c’était bien toute autre chose. Il enchaine plutôt sur son ressenti, fuyant alors le regard de la blondinette. Il n’assume pas tellement d’être à ce point indécis, alors que la maturité de son âge en attend probablement plus de lui. Déchiré entre deux femmes, c’est bon pour un ados, un jeune adulte. Pas un quarantenaire. Mais ça lui allait tellement comme un gant. Un type qui n’a jamais su quoi faire de sa vie. Qui n’a jamais pris les bons chemins. Qu’espérait-il à croire en l’âme sœur ainsi ?

Jo elle est plus assurée que lui. Comme si les rôles étaient inversés. La gamine qui prend les devants. L’adulte qu’est le plus paumé des deux. Alors elle pose sa main sur la joue du blondinet, le forçant à détourner l’attention vers elle. Il ne se fait pas tellement prier, pour plonger son regard dans le sien. Son cœur rate encore un battement, mais il n’en montre rien. Il reste fort en apparence. En total contradiction avec son être intérieur. Intentionnellement, ou non, Jo s’avance, brise la distance qu’il restait entre eux, par son geste. Leurs bustes se frôlent, faisant monter la tension. L’attirance. La respiration de Ricky gonfle un peu plus son torse. Tandis que son cœur tambourine un peu plus dans sa poitrine. Que ce soit par angoisse, ou par désir naissant. “ Moi aussi. J'ai du mal à comprendre tout ce qu'il se passe, comment gérer. Et... j'ai peur. “ Peur partagée. Bien que dans le fond, elle n’en n’ait pas les mêmes raisons. C’est pas de ses sentiments ou de son attirance qu’il a peur Ricky. C’est de son indécision et de faire un mauvais pas. Il ne veut pas être ce genre d’homme à la double vie. Il ne veut pas faire souffrir Erika non plus. Pas en merdant comme ça. C’est pour ça qu’il reste immobile, incapable de faire quoi que ce soit, si ce n’est combattre cette envie qui le ronge de l’intérieur. Une envie de tout envoyer valser et de se jeter sur Josephine. Sur ce canapé, sur la table, contre le mur, il n’en n’aurait rien à faire, juste l’avoir elle. Mais c’est pas possible. Pas bien. Mauvais timing. Il ravale ses idées, ses désirs, aussi bien qu’il le peut, en se tenant si crispé et inerte. Y’a que la main de la jeune femme qui se défait de sa joue, retombant le long de son corps. “ Je ne crois rien du tout. On est pas ensemble, tu ne peux pas me larguer. “ Non il peut pas. Mais il avait l’impression qu’elle le prenait comme ça. Il pince fort ses lèvres l’une contre l’autre, tandis que ses yeux clairs voyagent sur le visage si attirant de l’étudiante. “ Je ne veux pas te retenir si tu veux partir. “

_ “ J’veux pas. “

Qu’il murmure la voix raillée et cassée par les émotions qu’il ne contrôle plus très bien. Non il ne veut pas, et pourtant dieu seul sait à quel point sa conscience lui crie de le faire. Il reste là, de bonnes secondes, ses yeux tombant sur les lèvres de Josephine. Il en aurait envie, oh oui très envie. Mais il finit par détourner les yeux, se flagellant intérieurement. Et c’est finalement lui qui recule, lui qui remet de la distance entre eux, à contre cœur. Mal au ventre, gorge sèche, ramdam dans les oreilles. Visage en surchauffe. Il passe finalement ses deux mains dans ses cheveux qu’il balaye en arrière, avant de poser ses paumes sur ses yeux qu’il frotte nerveusement. Fais chier, qu’il pense si fort.

_ “ J’veux pas... J’veux pas être comme ça. “

Qu’il râle, grognant contre lui-même, laissant ses mains retomber le long de son corps, tandis qu’il se rassoit sur le canapé. Sa nuque tombe en arrière, sur le dossier de celui-ci, mais ses yeux eux, en reviennent au visage de Josephine, un peu plus haut.

_ “ Y’a Erika. J’veux pas lui faire ça, dans le dos. “

Qu’il explique, se redressant, les coudes sur les cuisses, le visage toujours levé vers la silhouette de Jo. Les traits tiraillés, l’incertitudes au visage.

_ “ Et toi Jo... Tu mérite pas ça. “

Qu’il ajoute plus murmuré, plus bas, la gorge serrée et ça s’entend. Josephine, elle mérite cent fois mieux que d’être la fille de l’ombre. La maitresse. Ou même la mal jugée dans l’histoire, celle qui pique le copain de l’autre. Parce que c’était ce qui arriverait, si ça venait à savoir. Y’aurait tellement d’embrouilles auxquelles il ne veut pas mêler la pauvre blondinette. Puis il a passé l’âge des décisions irréfléchis. Même s’il a l’impression qu’il y a mille lieux qui le séparent d’Erika, est-ce que ça irait mieux avec Jo ? Rien n’était moins sûr. Et plus il y réfléchissait, plus il se noyait.

_ “ J’me sens vraiment... Immonde. J’crois que c’est ça le mot. “

Dans un sens comme dans l’autre. Pour celle qu’il aimerait avoir et qui l’espère. Pour celle qu’il a et avec qui il n’est clairement pas assez sincère.

_ “ J’suis désolé, t’as pas besoin d’un indécis sur le dos. “

Qu’il ajoute, reposant finalement son visage entre ses mains, le frottant nerveusement. Pour finalement venir attraper le téléphone de Jo entre ses mains, et le lui tendre vers le haut.

_ “ Tu devrais le rappeler. “

Qu’il murmure finalement, le son de sa voix en total contradiction avec ce qu’il lui demande. Parce que ce Tom lui, il a l’air de savoir ce qu’il veut. Sans un doute. Sans une autre meuf dans l’histoire. Et ça fait mal. Alors il baisse les yeux, fuyant le regard de Jo parce qu’il ne veut pas voir ça. Il ne veut pas voir cette attirance entre eux, se briser. Il aime ça. Mais il sait aussi que ça devient indécent. Que ça n’a pas sa place, aussi fort soit cette envie d’elle qu’il tente de surmonter.

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Les mots de Ricky la glacèrent, alors qu'il s'était pourtant rapproché encore, créant un contact entre leurs deux corps, contact qui avait empli Josephine de désir. Elle avait bien compris que la première fois qu'il avait dit qu'il ne voulait pas signifiait qu'il ne voulait pas partir, la quitter elle. Mais il avait vite répété ces mots, en leur donnant un tout autre sens. Il ne voulait pas lui faire ça, se faire ça à lui aussi, et il le fit comprendre en reculant. Elle recula aussi, brisant toute proximité entre eux, tandis qu'il continuait à parler.

Il lui parla d'Erika, d'elle aussi, ne voulant faire ça à aucune des deux, tandis qu'elle sentait un mélange de honte et de culpabilité l'envahir. Elle savait qu'il avait quelqu'un d'autre, et elle avait tout fait pour repousser la situation dans laquelle elle se trouvait actuellement. Sauf dans ces dernières minutes, où elle avait apparemment repoussé tous ses principes pour, au nom de la franchise, laisser le champ libre au désir qu'elle ressentait pour Ricky. Il était déjà pris. Elle devait renoncer à lui. C'était ce qu'elle s'était déjà dit il y avait une semaine, convaincue qu'elle allait y arriver, et pourtant elle se retrouvait beaucoup trop proche de lui, dans son salon, quelques jours après. Bravo Josephine, belle manière de tout foirer. Son coeur battait à lui exploser la poitrine, et elle sentait qu'elle avait les mains glacées, détail insignifiant mais tout de même étrange.

C'était une connerie, ce qu'elle ressentait était une connerie, la venue de Ricky était une connerie, cette soirée était un désastre. Elle recroisa ses bras, consciente du malaise qui allait commencer à s'installer. Elle battait rapidement des cils, elle le sentait, essayant de rassembler ses pensées et de trouver quoi faire ensuite, comment se sortir de cette situation de rejet si inconfortable, tandis qu'une voix dans la tête lui disait que ça n'était pas un rejet total, elle avait bien compris qu'il voulait d'elle aussi. C'était d'ailleurs ce qui rendait toute cette situation si étrange, et ce qui faisait que Josephine sentait qu'elle allait avoir du mal à passer à autre chose.

Pourtant, il le faudrait. Elle qui refusait toujours de s'attacher aux garçons qu'elle rencontrait était tombée bien bas, surtout quand Ricky dit qu'il se sentait immonde. Elle s'en voulut d'autant plus en sachant ça, bien qu'étant tout de même consciente qu'ils avaient été deux à jouer à ce jeu.

Jeu qui s'interrompit définitivement pour Josephine quand il lui tendit son téléphone, où la notification de l'appel manqué de Tom s'afficha, trop lumineuse, trop présente. Ainsi donc, malgré tout ce que Ricky lui avait dit, tous ces moments de jalousie, tous les signaux que Josephine avait cru recevoir, il l'envoyait en rejoindre un autre. Elle en fut extrêmement peinée, mais ne voulut pas le lui montrer. Très bien, il était donc définitivement temps qu'elle parte rejoindre un homme célibataire qui voulait d'elle, même s'il lui faudrait quelques temps pour rayer définitivement Ricky de sa vie.

- Ricky... C'est pas une bonne idée non plus.

Après quelques instants à fixer le téléphone en se mordant la lèvre, sans se sentir la force de faire quoi que ce soit, Josephine se força à le prendre, décidant de commencer dès ce soir à passer à autre chose.

- Tu sais quoi ? Tu as raison. Je mérite quelqu'un qui veut de moi... Et il m'attend.

Elle prit son sac, y rangea rapidement son téléphone et ses clefs, et se dirigea vers la sortie, incapable de supporter tout ça une seconde de plus.

- Claque la porte en sortant. Pas la peine de m'envoyer un SMS, je vais nous faciliter la tâche en te disant dès maintenant que je n'y répondrai pas.

Elle sortit de son appartement, fuyant Ricky, marchant rapidement à la recherche d'un air frais qui la sauverait de cette sensation d'étouffer, sachant que des taxis passaient très souvent en bas de son immeuble. Il y en aurait bien un pour l'emmener jusqu'à sa destination, où elle pourrait boire et danser jusqu'à l'oubli, avant de rentrer accompagnée... mais pas chez elle, de peur que la présence de Ricky ait marqué les murs, que son odeur soit encore là, que tout le lui rappelle.

Un étage, puis un autre, et elle se trouva dehors, combattant les larmes, se battant pour se sortir de ce foutoir, de ce qu'elle ressentait. Elle fit quelques pas et se mit à attendre un taxi, se demandant si elle devrait contacter Izaline, puis se ravisant. Elle avait envie d'oublier, pas de tout remuer en racontant ce qu'il venait de se passer. Et elle connaissait Iza, cette dernière finirait bien par lui retirer des informations. Tout ceci viendrait bien assez tôt, toujours trop tôt.

Une lumière de phares au loin, un espoir ténu, puis une voiture civile qui passe à toute vitesse. Pas un taxi à l'horizon. Très bien, Josephine marcherait - le bar était à une petite demi-heure de chez elle. La route en talons ne lui faisait pas peur, elle était habituée.

Commencer à marcher, s'arracher à l'emprise de Ricky, à son regard perdu et désireux, rejoindre la fête. Elle sortit son téléphone, envoyant un simple "J'arrive" à Tom, ne tenant pas à épiloguer, se préparant déjà à revêtir un visage heureux, celui d'une fille qui n'était pas dans une situation compliquée avec un homme plus vieux et déjà un couple, et qui venait de lui faire comprendre qu'elle devait lâcher l'affaire, même s'il la désirait. S'il n'était pas assez fort pour quitter sa vie, alors Josephine le ferait pour lui. Elle se demandait combien de verres, de soirées, de nuits il faudrait pour que ce foutu espoir qui s'accrochait à elle, celui de le voir débarquer à chaque instant et qu'il la prenne dans ses bras, disparaisse.

Elle s'en voulait d'avoir agi comme elle l'avait fait, et s'en voudrait sûrement pendant un bout de temps. Ils avaient tous les deux agis comme des ados, et elle essayait de se convaincre qu'ils avaient fait le bon choix en coupant net à tout ce qui aurait pu se passer, tandis que dans sa tête les images de lui contre elle s'ils avaient pris un chemin tout différent ne cessaient de tourner en boucle, de la hanter.

Elle était à peine partie qu'elle savait déjà que la route serait longue, et se demandait si elle avait fait le bon choix d'arrivée. Mais bon, il l'avait dit lui-même, elle ne méritait pas ça - et elle était bien d'accord, quand elle mettait ses sentiments de côté pour écouter sa raison.

 

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“ Ricky... C'est pas une bonne idée non plus. “ il s’en doute bien. Que ce gars là c’est pas sérieux pour elle. Mais pour ce jeune-homme ça l’est sûrement. Lui il ne se jouerait pas d’elle. Lui il n’a certainement pas une autre fille dans l’histoire. Il doit y avoir pas loin d’un million de bonnes raisons pour choisir ce Tom, à la place de Ricky. Pourtant Jo elle hésite, elle fixe le téléphone, de longues secondes, avant de finalement, manquer de le lui arracher des mains. Le visage changeant. Il n’est pas dupe Ricky, il sait qu’il l’a blessé. Et le pire, c’est qu’il se blesse lui-même. Parce que ça lui fait mal. Ce qu’il dit, ce qu’elle dit, ce qu’il voit. “ Tu sais quoi ? Tu as raison. Je mérite quelqu'un qui veut de moi... Et il m'attend. “ Son cœur se serre. Elle ne comprenait finalement pas. Il la voulait justement, le problème étant là. Alors il sent sa gorge nouée, les palpitations dans son torse. Son cœur qui s’accélère, comme pris d’une étrange panique. Etrange pas tant que ça. Il sait bien ce qui se passe au fond de lui, il ne veut juste pas l’assumer. Elle est chez elle et pourtant, elle s’enfuit, l’abandonnant derrière. “ Claque la porte en sortant. Pas la peine de m'envoyer un SMS, je vais nous faciliter la tâche en te disant dès maintenant que je n'y répondrai pas. “ Il est quelque peu pris de court par une telle réaction. Elle ne cherche pas à discuter, juste à fuir. Alors immobile, perplexe, et tiraillé par cette horrible sensation de perdre quelque chose d’important, il ne peut que l’observer lui tourner le dos et claquer la porte derrière elle. Bientôt, il n’entend même plus le bruit de ses talons dans les escaliers du bâtiment. Il lui faut de bonnes secondes à lui, une fois le silence retombé, pour retrouver un souffle régulier, et ses esprits. Le cœur tambourinant dans son torse, il finit par serrer les poings, cherchant à combattre cette petite voix, sa conscience, qui tentait tant bien que mal de lui faire reconnaitre que c’était mieux ainsi. Qu’il y a Erika et qu’on ne joue pas le cul sur deux chaises. Pourtant, il finit par relever les yeux, fixer la porte. Et comme si d’un seul coup, il parvenait à faire taire toutes les alarmes dans sa tête, il se dirige droit vers la sortie de l’appartement, d’un pas semblant assuré. Déterminé.  

Il aurait presque l’air fâché, tant son geste à l’ouverture de la porte est vif. Il l’ouvre à la volée, et la laisse se refermer derrière lui alors qu’il descend hâtivement les marches. Il l’entend claquer la porte, tandis qu’il tente d’aller le plus vite possible dans les marches, la main caressant à peine la rampe de sécurité. Il pousse les deux portes de l’immeuble aussi brusquement, sortant en trombe et foulant le bitume extérieur. Il ne s’arrête qu’à deux pas plus loin, scrutant à droite, puis à gauche. Il ignorait quel chemin pouvait avoir pris Jo, il prend à droite, suit son instinct. Et ce n’est qu’au bout de quelques pas qu’il reconnait la tignasse blonde et ses chaussures. Elle avance, à pied, avec de tels talons ? Le cœur s’acharnant toujours autant dans sa cage thoracique, il reprend sa course, il accoure même en direction de Jo. Il ne tarde pas à la rattraper, la dépassant pour venir se poster devant elle et l’arrêter. Une main en avant dans le cas elle ne s’arrêterait pas, main qui se plaque alors contre l’épaule de Josephine. Cela l’arrêtant, et leurs regards se croisant à nouveau, il ôte rapidement ses doigts. Sa main reste un court instant en l’air avant de retomber le long de son corps. Léger silence, ils se toisent. Le regard incertain, la respiration toute autant.  

_ “ J’suis désolé, le prends pas comme ça. “

Qu’il commence la voix tiraillée comme le fond de sa gorge.

_ “ J’suis pas... J’veux pas que ça se finisse comme ça. J’veux pas que tu... “

Que tu partes comme ça. Il détourne les yeux, il inspire. Il ne sait guère comment tourner ses phrases. Il serre fort ses lèvres l’une contre l’autre, muet, avant de reposer son attention sur elle. Y’a pas trop de sens à ce qu’il essaye de dire dans sa tête, mais faut qu’il essaie de le lui faire comprendre malgré tout.  

_ “ J’peux pas... Nous deux, alors qu’il y a Erika tu comprends ?! J’veux pas être de ceux qui jouent sur deux tableaux en même temps. … J’ai jamais dit que tu... Que ce n’était pas... “

Il souffle, comme s’il s’énervait après lui-même. Passe ses mains nerveusement dans ses cheveux qu’il ramène une nouvelle fois en arrière, avant que ses doigts ne se posent sur ses propres hanches. Et que le bleu de ses yeux en reviennent au visage angélique de Joséphine.

_ “ J’ai jamais voulu que tu crois que je ne ressentais rien pour toi. “

Qu’il finit par avouer, la chaleur lui montant aux joues, et les yeux fuyant furieusement le regard de Joséphine, pour se relever vers la pénombre du ciel.

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Ce qui était en train de se passer, combiné à toutes les conversations que Josephine avait pu avoir avec Izaline à ce sujet, était en train de la convaincre qu'il était bon qu'elle passe à autre chose. Elle s'était amourachée de Ricky en sachant parfaitement qu'il était en couple. Elle ne voulait pas détruire ce qu'il avait avec cette Erika, elle ne voulait pas de tout ça, mais elle n'arrivait pas à non plus à oublier Ricky, son rire, son regard posé sur elle, la façon qu'il avait de se passer la main dans les cheveux. Ridicule, surtout quand de l'autre côté il y avait Tom, si parfait, si attentionné, si célibataire.

Elle commençait à avancer dans la nuit, sachant pertinemment qu'elle finirait vite par regretter de marcher dans ces chaussures. Elles étaient faites pour danser un peu, beaucoup flirter et être enlevées à la va-vite en rentrant chez soi en bonne compagnie. Tout le contraire de ce qui se passait maintenant, tandis qu'elle fuyait son appartement dans lequel se trouvait Ricky. Pathétique. Elle rangea son téléphone dans son sac tant bien que mal, sentant qu'elle tremblait sous le coup de l'émotion. Il était temps qu'elle reprenne sa vie en main.

Le bruit plaisant de ses talons contre le bitume rythmait sa fuite, troublant le silence de la nuit, lui donnant l'impression que le monde entier savait où elle se trouvait, fuite tout à coup interrompue par Ricky, placé devant elle, l'empêchant de s'éloigner à nouveau de lui. Les larmes qui montèrent rapidement aux yeux de Jo, mélange de surprise et de joie. Il était là.

Il s'excusa, et elle vit que lui aussi semblait profondément touché par ce qui était en train de se passer. Elle le laissa parler, laissant les silences entre chacune de ses phrases se réapproprier la nuit, non pas parce qu'elle était en colère, mais parce qu'elle était émue, parce qu'il comptait pour elle et qu'elle mourait d'envie de le lui dire, qu'il la prenne dans ses bras, que tout soit oublié. Le nom d'Erika qui vint la peiner encore un peu plus, pour elle, pour l'autre. Elles étaient deux, Erika était légitime, Josephine n'avait rien à faire dans cette histoire et dans le coeur de Ricky. Alors pourquoi l'avait-il rattrapé et se tenait-il là, devant elle, l'air tout penaud d'un adolescent sur le point de faire sa première déclaration d'amour ? Peut-être se faisait-elle juste des idées, une fois de plus, mais elle trouvait cela étrange.

Et tout à coup, contre toute attente, il finit par cracher le morceau. J’ai jamais voulu que tu crois que je ne ressentais rien pour toi. Josephine sentit toute conviction qu'elle allait réussir à passer à autre chose quitter son être, comme si ces dernières semaines à essayer d'oublier Ricky n'avaient jamais existées. Elle comptait pour lui. Ces mots lui firent un bien fou, et l'attendrirent immédiatement. Que répondre à un homme en couple avec une autre qui finissait par lui dire tout ce qu'elle rêvait d'entendre ?

Elle finit par hocher la tête et hausser les épaules, s'avouant vaincue. Elle avait tout fait pour mettre de la distance entre eux, pour qu'il puisse retourner à sa vie de couple, et pourtant voilà qu'ils se faisaient face tous les deux, en plein milieu de la nuit dans la rue. Elle vit qu'il attendait une réponse, quelle qu'elle soit, et décida d'arrêter de peser soigneusement chacun de ses mots. Il avait été franc avec elle, elle le serait avec lui.

- Ricky... Je peux plus. Je peux plus faire semblant que je t'oublierai vite, je peux plus fuir pour en rejoindre un autre si tu me rattrapes.

Josephine se recula un peu, faisant à nouveau les cent pas, cherchant peut-être un moyen de fuir le regard de Ricky, ce qui lui permettait de trouver le courage nécessaire pour ce qu'elle était sur le point de dire.

- Je sais pas où en est. J'aimerais te rendre la tâche plus facile en essayant de paraître indifférente, crois-moi, j'ai essayé, mais c'est impossible. Pas quand tu me regardes comme tu le fais actuellement. Pas quand la seule chose que j'ai envie de faire actuellement, depuis que tu as posé ta main sur mon épaule, c'est de t'embrasser. Je suis désolée.

Rougeur venant lui brûler les yeux au moment où ces mots traversèrent ces lèvres. Elle le voulait, elle le savait, et il le savait désormais aussi. Elle avait joué toutes ses cartes, advienne que pourrait, et elle se préparait déjà à avoir le coeur brisé. Des années à ne pas s'attacher, à lâcher ses relations dès que ça devenait trop sérieux, tout ça pour se faire briser le coeur sur le trottoir de sa rue, alors qu'elle l'avait vu venir depuis le début.

Une brise fraîche vint caresser les bras nus de Josephine, la faisant frissonner. Elle se maudit d'être partie trop vite, sans prendre sa veste, en sentant la chair de poule s'emparer de sa peau. Elle se frotta les bras doucement, essayant de se réchauffer et se préparant à ne pas pleurer. Elle serait forte, comme toujours.

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“ Ricky... Je peux plus. Je peux plus faire semblant que je t'oublierai vite, je peux plus fuir pour en rejoindre un autre si tu me rattrapes. “ Culpabilisant, il se recule, frottant nerveusement ses mains sur son jeans en dessous ses hanches. C’est vrai qu’il agit bêtement, et qu’il n’aide en rien. Mais il a toujours été comme ça Ricky. Irréfléchi, et impulsif. Ce qu’il regrette quelque peu devant la réaction de la blonde. Elle a raison. Il ferait mieux de nier cette attirance qu’il a pour elle, ce serait plus respectueux, pour qu’elle passe à autre chose. Mais la jalousie qu’il éprouve envers cette possible “autre chose” l’empêche d’agir correctement. Il pourrait s’excuser, encore, mais il se contente de baisser les yeux, coupable, à bout de mot de toute façon. Il ne sait pas où il en est, que devrait-il ajouter de plus ? Elle l’imite elle aussi. Elle se recule, puis gigote. Il fuit son regard, baladant le sien vers la rue. “ Je sais pas où en est. J'aimerais te rendre la tâche plus facile en essayant de paraître indifférente, crois-moi, j'ai essayé, mais c'est impossible. Pas quand tu me regardes comme tu le fais actuellement. Pas quand la seule chose que j'ai envie de faire actuellement, depuis que tu as posé ta main sur mon épaule, c'est de t'embrasser. Je suis désolée. “ C’était comme un violent coup de poing dans son cœur. Une sensation à la Roméo et Juliette, d’un truc tant désiré mais interdit. Qu’il s’interdit de lui-même plus que de de bonnes raisons. Parce qu’il ne veut pas faire ça, plus faire ça. Il a perdu Drew dans le passé, juste parce qu’il a laissé ses pulsions stupides le guider. C’est pas la vie qu’il veut mener Ricky. Il laisse ça à Misha Kane et ses congénères.

_ “ Sois pas désolé, arrête de t’excuser. “

Qu’il grogne presque, les yeux toujours fuyants. C’était visiblement une habitude entre Jo et Erika, de s’excuser de tout alors qu’elles ne sont clairement pas les plus déplacées de l’histoire. Et le visage baissé, il finit par remonter le regard, fixant finalement Jo. Incertains, ravalant une certaine colère, qu’il éprouve envers lui-même. Cette sensation d’être déchiré entre deux femmes ne lui allant clairement pas. Beaucoup apprécieraient, mais lui, ça lui semblait juste impensable. Trop de romantisme en lui, qui se faisait fouetter et ramener à la réalité : la vie est loin d’être un film romantique à la sauce Netflix.

_ “ C’est moi qui merde dans cette histoire. “

Qu’il ajoute, avant de balader ses yeux et de réaliser qu’elle frissonne. En même temps, la tenue est bien légère pour une fin septembre. Le froid se lève de jour en jour, et les nuits sont plus que fraiches. Partie agacée, elle n’y a certainement pas pensé. Alors le cœur se serrant dans sa poitrine, il finit par faire quelques pas vers elle. Il brise la distance qui les sépare, sans pour autant être bien sûr de lui. Il passe ses bras autour de la silhouette de Jo, puis ses mains s’abattent dans le dos de la jeune femme qu’il attire vers lui. De sa petite taille, à côté de la sienne, elle a le visage qui rencontre le torse du blondinet. Il reste droit du visage, s’empêchant de venir renifler le parfum de la chevelure dorée. Dans un sens, malgré son geste, il garde ses distances, parce qu’il ne veut pas fauter. Y’a toujours Erika dans sa tête. Erika qui ne mérite pas ça. Il ne comprend même pas son attirance pour une autre alors qu’il a dans sa vie, une fille comme Erika. Adorable, douce, attentionnée, marrante, et d’une beauté sans pareille. Il était ou son problème à Ricky ?

_ “ J’veux juste faire le ménage dans ma tête, j’veux pas faire quelque chose dans le dos d’une autre, tu comprends ? “

Qu’il murmure cette fois, la voix enraillée. Ouai, il a besoin de faire le point. De se retrouver seul avec lui-même. De discuter et poser les choses avec Erika. Mais certainement pas de faire des conneries dans son dos. Erika vaut mille fois mieux que ça. S’il veut merder correctement, c’est pas avec elle à son bras. Sans rien ajouter de plus, il remonte finalement juste l’une de ses mains, qu’il passe dans les cheveux de la jeune femme. Toujours en fixant la rue devant lui, pour que son visage reste immobile et droit.

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Moment étrange, distendu dans le temps. Il voulait qu'elle arrête d'être désolée, mais ça allait être difficile. Elle était désolée pour lui, de tout ce qu'il traversait, bien qu'étant pleinement consciente qu'il était aussi fautif dans l'histoire, mais aussi pour elle. Elle qui s'était promis de ne plus s'attacher, de ne plus se sentir vulnérable, se trouvait face à Ricky, tremblante, mourant d'envie de l'embrasser, d'être avec lui. Pour une nuit, et beaucoup plus. Elle comprenait ce qu'il voulait. Il ne voulait pas qu'elle parte rejoindre Tom, il voulait qu'elle rentre chez elle, qu'il la sache en sécurité et seule. Il était en couple, elle le savait pertinemment, et il lui avait assez rappelé. Devrait-elle l'attendre, laisser passer sa vie pour un homme qui partageait déjà celle d'une autre ?

Lui qui essayait temps d'établir des limites entre eux laissa pourtant tout tomber au premier frisson de ses épaules, et s'avança pour l'enlacer. Les bras de Ricky. Elle y avait souvent pensé, mais n'aurait jamais cru qu'un jour elle s'y retrouverait vraiment. Sensation de chaleur qui envahit tout son corps, impression de n'être qu'une ado dans les bras de son premier crush. Il était doux, et son parfum donnait encore plus à Josephine l'envie de l'embrasser. Elle restait cependant immobile, les yeux à la hauteur de son épaule, comme figée dans le temps. Si jamais elle l'embrassait, elle savait qu'il ne l'arrêterait pas, et qu'il était possible que la soirée s'accélère et se termine dans ses draps.

- Je sais. Je comprends, Ricky.

Soupir qui s'échappa dans l'air frais de la nuit, mains qui finirent par cesser de lutter et par s'enrouler également dans le dos de Ricky, à le caresser doucement. Ca n'était pas bien, ils s'étaient empêtrés dans un beau bazar. Il fallait qu'elle agisse. Ils ne pouvaient pas rester comme ça. Moment volé au temps qui n'aurait pas dû exister, et dont Josephine se rappellerait pourtant toujours. Elle leva la tête vers lui, ses lèvres à quelques centimètres à peine de celles de Ricky, distance qu'il aurait été trop facile de rompre.

- Je ne veux pas voir Tom. Je ne vais pas voir Tom. Je vais rentrer. Et... Tu devrais rentrer chez toi aussi.

Pointe des pieds lui permettant d'embrasser tendrement la joue de Ricky, tout en luttant contre tous ses démons intérieurs. Un pas, puis un autre, fin de cette étreinte magique. Faible sourire à Ricky, avant de trouver la force de faire demi-tour, de partir, de rentrer chez elle, sans penser à la nuit compliquée qui allait suivre, elle s'en doutait. Claquement de ses talons sur le pavé, refaisant le même chemin que plus tôt mais dans l'autre sens, combat intérieur pour ne pas se retourner, et voir s'il la regardait.

Ils se quittaient sur un statut quo, pas de vraie décision prise, mais beaucoup de non-dits révélés, pour le meilleur ou pour le pire. Chemin retour qui lui parut durer une éternité, elle enleva ses talons une fois chez elle et ne prit pas la peine de se changer avant de s'écrouler sur son lit, un oreiller dans ses bras. Ca n'était pas supposé se passer comme ça. Ils auraient dû se dire au revoir poliment, après s'être expliqué sur cet horrible malentendu, pas se laisser avec encore plus de désir et de tension entre eux qu'avant. Envie déjà de le retrouver, de le contacter, envie qu'elle allait doucement laisser mourir. Elle ne voulait pas penser à ce qui allait advenir les jours suivants, ni à Ricky et ses décisions, ni à Tom qui devait encore l'attendre. Elle voulait juste dormir et oublier pour quelques heures.

[Fin]