seringue vide (tw)

seringue vide

@Misha Kane

tw; drogue, abus, violence.

journée embrumée, nuages en deuil, rues désertes, personne ne s'aventure jusqu'ici. tes états d'âme ont déteint sur l'éther et le voilà qui crachote des clapotis d'eau comme des crachats, postillons agressifs sur un bitume jonché de cadavres de bâtons de feu. ton corps ressemble maintenant à ceux que l'on dissèque dans ces laboratoires à la recherche d'indices, de preuve. des jours de fuite, des jours de cavale, à dormir là où l'on voulait bien de toi, à refuser les aliments qui font souffrir ton gésier déjà bien trop sensible. tes bras portent sur eux la marque de tes vices, petite fille fragile aux moeurs légères. piqure d'héroine, crack inhalé et aussitôt recraché en plusieurs halos de souffrance cancéreuse. tu as voulu fuir, mais fuir quoi au juste ? sms échangés, frangin en panique, soeur adoptive qui en fait des siennes, qui te reproche tout ce qu'elle a fait par le passé. quoique tu fasses, ce n'est jamais assez. noor ne va pas là, noor ne prononce pas ces mots, noor qu'est-ce que tu fais, avec qui tu es, ne fais pas ça. alors te voilà, dans ce gilet encrassé par tes ébats, luxure factice que tu t'es imposée pour te sentir vivre, bâton brûlant cancérigène, dextre fragile, tu te tiens assise sur le trottoir, tes cheveux longs puent la crasse d'une gamine bien trop insouciante, bien trop ingénue, bécasse, candide, et tu paies le double des pots cassés. que vas-tu dire en rentrant, que va dire ton frère en voyant tes cicatrices comme du braille sur ton corps amaigri, presque cadavérique. fumée entre les lèvres qui se disperse dans l'atmosphère, tu essuies les remarques des quelques affamés de luxure qui viennent t'aborder en profanant des insultes que tes tympans essaient de faire taire. le seul que tu as osé prévenir, c'est misha. misha que personne ne veut fréquenter, misha aux multiples conquêtes, misha qui ne t'a jamais touché, seulement l'âme du bout des doigts, et c'est en cette journée pluvieuse que tu l'attends, seule, apeurée, fiévreuse, le teint jaune à cause de la drogue que tu t'es tapée et les cuisses tremblantes à cause de ces types qui ont abusé de toi dans ces endroits putrides, perfides, où tu as élue domicile en pensant que ce serait mieux que chez toi, chez adán. tu le sais, qu'en rentrant, rien ne va s'arranger, toi, petit oiseau qui voulait quitter ce nid rongé d'insectes, ce nid dont tu es tombée tête la première. fissure du myocarde amoché par ces centaines de cigarettes que tu t'es enfilée, crissement de pneus que tu entends au détour d'une avenue. tu n'oses même pas relever la tête, le visage crispé portant les marques de la haine de l'être humain sur ses congénères, du bleu, violet, jaune décorant tes arcades comme une peinture de maitre. le monde a dégueulé des relents acides sur ton visage, et te voilà souillée à jamais pour avoir voulu braver l'interdit, t'écarter du domicile familial. tu reconnais la voiture de misha, tu le vois arriver, tu l'imagines inquiet, lui qui d'ordinaire crache sur tout et tout le monde, se fiche de la loi et des filles comme toi, le voilà qui se prend d'un élan de solidarité humaine, peut-être parce qu'il reconnait en toi le gosse qu'il est au fond. tu n'as même pas la force de parler, assise sur ce bitume glacial, les pieds en plein dans une flaque boueuse, tu écrases ta cigarette par terre en le voyant descendre de sa voiture et venir vers toi, les mirettes remplies d'inquiétude. m... misha... murmure à peine audible, peine qui se voit à des kilomètres.

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♛  w/ @Noor Giménez

Il n’a pas pour habitude de s’inquiéter pour autrui, Misha. C’est pas ses oignons. Pas son cul non plus. Alors il n’est certainement pas dans tous ses états, comme peut l’être Adàn. Mais il ne pouvait pas nier que les derniers sms de Noor, ne l’avait pas rassuré pour autant. Elle les avait fait miroiter quelques jours, avant de finalement lui demander de venir la chercher. Mais seul. Pas d’Adàn. Ça l'embêtait un peu, parce qu’il savait bien que le moustachu était mort d’inquiétude pour sa sœur. Mais d’un autre côté, il avait l’avantage sur le flic, pour une fois. Et ce n’était pas négligeable, cet atout. Il allait pouvoir lui renvoyer à la figure pendant longtemps. De nombreuses années. Que sa sœur, avait plutôt confiance en Misha Kane, avant Adàn Gimenez. Il n’avait pas fini de s’en vanter, le taulard. Cependant, allait-il être à la hauteur des problèmes de Noor ? Misha, il est bien plus doué pour les causer, que les résoudre, les problèmes. Pourtant, le voilà au volant de sa caisse, dont il faudra songer à faire le plein d’essence. Sans quoi, il lui fera rapidement le coup de la panne, à Noor, si elle grimpe sur son siège passager. Et ce serait même pas voulu. Il n’avait pas prévu de lui courir après toute la nuit. Il devait masser les pieds gonflés de sa femme enceinte, autant dire que le programme était soudainement plus alléchant. Non, il n’a pas une once de culpabilité dans toute l’histoire de Noor. Et ce bien malgré les accusations d’Adàn, persuadé que Misha est coupable de tous les maux. Oui, il fréquente Noor, mais il ne l’a jamais poussé dans les vices. Elle n’avait pas eu besoin de lui pour ça. Il l’avait peut-être entraîné vers le bas, au lieu du haut, sans trop s’en rendre compte. Mais ce n’était pas lui le vrai coupable, dans toute cette affaire. Puis quand on va mal, c’est certainement pas Misha Kane qu’il faut trouver. Il n’est pas connu pour son attention, son affection ou ses bonnes paroles. Tout le contraire même.  

Il fait noir, certaines parties de la ville sont même carrément éteintes. Il est tard, trop tard dans la nuit. Alors il ralenti, roulant doucement, scrutant les trottoirs à la recherche de la silhouette tant espérée. Il connait ces quartiers miteux, pourris, mal famés. Il y a évolué, un peu plus de dix ans, quand il s’est barré de chez les Kane. Ça l’inquiète un peu plus, finalement. Parce que Noor, toute seule ici, ça craint. Pour n’importe qui, ça craint. Même si lui n’est plus là pour faire sa loi, d’autres ont pris sa relève après son incarcération. Il finit par arrêté son regard sur elle. Elle est là, assise sur le trottoir. Il s’arrête, se contentant de mettre sa voiture en warning. Ce n’est pas pour la circulation qu’il y a dans le coin. Il sort, lentement, les sourcils se fronçant à mesure que le visage de Noor se dessine sous ses yeux. Yeux qu’elle, elle a d’éclatée, probablement par la fatigue, mais surtout la drogue. Son teint est pâle, et il les remarque, les traces qu’elle a. Sur les bras, les jambes et le visage. Il les connait les gars du coin. Il en a été un, de ces types-là. Même s’il n’a certainement jamais dépassé les barrières qu’eux, n’ont visiblement aucune honte à enjamber.  

_ “ Putain, Nono. “

Qu’il marmonne plus pour lui-même, alors qu’il accélère le pas pour la rejoindre. Ils sont à présent éclairés par les phares de sa voiture, et il peut mesurer l’ampleur des dégâts, sur le visage si abîmé de la jeune femme. L’inquiétude se dessine sur le visage pourtant habituellement impassible du ténébreux, alors qu’il approche ses doigts des joues de Noor. Il les effleure, du bout de ses doigts, repoussant ses mèches de cheveux, décoiffés.  

_ “ T’as merdé Giménez. “

Qu’il chuchote, avant d’ôter sa veste de ses épaules, pour aller la déposer sur celle de Noor. Il sait que ce n’est pas ce qu’elle veut entendre. Qu’elle voudrait sûrement qu’il s’apitoie sur son sort, qu’il pleurer pour elle. Mais, elle a merdé. Profondément merdé. Comme lui, vingt ans plus tôt, quand il a fini dans ses quartiers là. Il n’a pas besoin de mâcher ses mots, ce n’est pas son genre. Et puis Adàn, il va en crever sur place, s’il découvre ça...  

_ “ Allez viens, faut pas que tu restes ici. Y’a un motel pas loin, tu pourras te doucher. Et manger. “

Il ne veut pas lui demander ce qu’il s’est passé, parce qu’il le sait. Il préfère qu’elle en parle, seulement si elle en a envie. Ça sert à rien de la braquer, de toute façon. Là, elle a juste besoin de se reposer, de se laver, et peut-être même, de passer un checkup à l’hôpital. Mais s’il ne fait que mentionner le mot, elle prendra ses jambes à son coup. Alors, il demandera peut-être l’aide de Darcy pour ça, une fois qu’elle sera à l’abris, dans une chambre d’hôtel. Au calme. Peut-être que là, elle acceptera qu’il l’aide comme il le faut. Il pose alors une main dans le dos de Noor, avec l’autre, il prend sa main, et il l’aide à se relever, alors que leurs chaussures se noient dans des flaques boueuses. Il l’entraine vers sa voiture, ouvrant la portière passagère, tandis que la pluie recommence à tomber. Il l’aide à entrer, ferme la porte derrière elle, puis reprend sa place au volant. Il coupe la radio, qu’il avait laissé. Et quand ses doigts entour le volant, il détourne le bleu de ses yeux sur Noor. Ses traits sont sérieux, et préoccupés. Elle ne l’a certainement jamais vu comme ça. Lui qui prend toujours tout à la rigolade. Mais Noor, s’il l’a approché simplement pour agacer Adàn, il ne peut pas nier qu’il s’y est attaché à la petite. Elle est comme lui. Deux âmes paumées, qui ne savent même pas ce qu’ils cherchent. Alors il marque un petit silence, le temps de laisser ses yeux vagabonder sur ce qu’il reste de Noor, avant de finalement rouvrir la bouche :  

_ “ Tu m’as vraiment fait flipper. T’as vraiment fait de la merde. “

Ça laisse un gout amer, de s’inquiéter pour les gens. Voilà pourquoi, il n’aime pas avoir d’ami.  

_ “ Je te poserais qu’une seule question... “

Il relève juste un peu la tête, alors que sa mâchoire, et ses doigts sur le volant, se serrent.  

_ “ Je veux avoir leurs noms... A ceux qui t’ont fait ça. “

Et elle le connaît, Misha. Elle sait bien que quand il saura qui a osé toucher à Noor Giménez, il risque d’y avoir des dents de cassées.

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@Misha Kane

tw; mention de drogue, d'abus, et de violence. mots crus.

t'as fauté. tu le sais. que t'as franchi la limite à ne pas dépasser, que t'as laissé ta peine éclater comme un projectile plein à ras bord d'hémoglobine, que ça tâche à présent les murs, le sol, les corps des êtres que t'aimes et que t'as fait replonger dans leurs propres démons. y'a pas que toi qui souffre, noor, y'a pas que toi qui a mal au coeur au point d'en faire éclater des bulles de haine tout autour. pourtant, là, t'as vraiment fauté. t'as agi comme si seule ta vie comptait, comme si y'avait pas ton frangin qui s'était barré en croisière à la dernière minute pour échapper au dessein tragique des coeurs en berne, t'as agi comme si ta grande soeur était pas elle aussi en train de foutre sa vie en l'air dans les jeux, le mensonge, les vices. comme si la terre entière était pas en train de cramer. la gorge brûlante s'étouffe de ces larmes qui sortent, abondantes, épaisses, pluie torrentielle qui s'abat à présent sur ton faciès fatigué, exténué, décomposé sous la lumière des néons blafards, clarté que tes yeux défoncés n'arrivent plus à distinguer proprement, qui forment à présent des tâches sur le champs de vision. alors, tout ce que tu peux faire, tout ce que tu sais faire, c'est rendre le tablier, l'refourguer à misha. l'homme à tout faire. le damné qui s'occupe des âmes tout aussi perdues que la sienne. tu le laisses parler, de sa voix rauque et profondément brisée, tu le laisses t'asséner encore un peu de ces coups violents, tu dis rien quand il parle avec des mots comme tu sais t'as vraiment merdé giménez, ou putain nono. n-o-n-o. syllabes affectives qui roulent et roulent sur le macadam. qui forment un halo protecteur autour de ton corps rachitique. la main passe derrière ton dos, provoque le contact rédempteur tandis que la carcasse se soulève difficilement. tu t'moques bien de vos pieds dans la boue, ou de la pluie qui recommence à faire des siennes, ou bien qu'ça ressemble à un d'ces films à la con sur pellicule grasse, parce que tu sais, au fond, tout au fond, qu'avec toi y'aura jamais d'happy end, qu'c'est pas pour les habitants de cette ville à la con, qu'ça sent la misère opprobre à chaque coin d'rue.

les mèches de tes cheveux s'écartent sous les doigts de l'homme au coeur brisé. tu dis rien. t'arrives pas. comment expliquer, comment scinder ce qui est terré au fond de ton être. par honte, par pudeur aussi, peut-être. parce que parler, ça veut dire rendre la vie à ces choses qui te font du mal, à ces actes qui tambourinent sur les coins de ton crâne. misha a la courtoisie d'rien te demander, pas encore tout du moins. les corps s'engouffrent dans la voiture laissée en warning, disparaissent bien vite des quartiers malfamés qu'vous connaissez par coeur, qu'vos âmes n'en peuvent plus, étouffent bientôt. tu laisses le vrombrissement du véhicule bercer ton corps qui te fait souffrir, tandis que les mirettes regardent droit devant le paysage s'étaler comme une carte postale funeste. les os saillants, la gueule cassée, fantôme cadavérique qui fait peine à voir sur les sièges immaculés de misha, tu te recroquevilles comme tu peux, avec toute ta force d'enfant, silencieuse, confuse. qu'est-ce que tu pourrais bien dire, de toute façon. c'est lui, le premier, qui brise le mutisme des coeurs inquiets. je veux avoir leurs noms, à ceux qui t'ont fait ça. la tête se balance côté vitre, tandis que les larmes coulent comme un collier de perle brisé. si seulement t'en avais, des noms, foutus patronymes pour mettre le doigt sur ces connards en pantalon camel, baskets fluorescentes, bouches bien trop ouvertes et cuillère qui brûle. tu peux lui donner des noms d'seringue, des marques de cachetons. mais des noms. à quoi bon. j'ai... ((raclement de gorge, pleurs qui s'intensifient malgré la douleur du corps maigre)) j'ai pas misha. tu comprends, j'ai pas. ta main qui se soulève, cherche la sienne, paniquée, apeurée. ne dis rien à mon frère. dernière parole qui se faufile péniblement entre les dents cassées. c'est qu'il en crèverait, ton frangin, il tiendrait pas le coup, il s'effondrerait, et toi avec. catalina, elle aussi, avec toute sa féminité qu'elle refoule tout au fond de son coeur tiendrait pas la route. c'est pas vous, les giménez, la tragédie funeste. congédier le sort, modifier le destin, c'est c'que vous tentez d'faire. mais à quoi bon, pour qui, pour quoi. le paysage se remplit peu à peu d'habitations, d'gens au visage inconnu, anonyme, qui s'avancent dans la pénombre d'une début de soirée. capuche que tu tires sur ta tête, veste de misha un peu plus serrée, qui suffit pas à supprimer le froid sibérien que ton être ressent. je.. silence. soupir. t'y arrives pas. à dire merci. ça te fiche la trouille. tu sens le regard inquiet se poser sur toi, sans un mot.

misha. les phalanges qui trouvent les siennes, finalement. se lient entre elles malgré la dangerosité d'une route mal surveillée, profitant des quelques secondes vous séparant de l'hôtel, des interrogations, des douches brûlantes, douloureuses, des aliments qui n'arriveront pas à pénétrer dans l'antre de juda, loin de tout, loin de la vie. l'hôtel qui se dessine à présent au fond de la rue, néons de mauvaise qualité qui clignotent comme pour vous dire que c'est par là pour les âmes qui souffrent.

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♛  w/ @Noor Giménez

Elle est étrangement silencieuse Noor. Non pas qu’elle soit du genre pipelette, habituellement. Mais ce soir, c’est une tombe, dans tous les sens du terme. Il est peut-être un peu con et stupide Misha, mais il sait bien pourquoi. Elle vient de faire une connerie, une grosse connerie qui a engendré un merdier pas possible. Et finalement lui, il sait ce qui la turlupine le plus la gosse. C’est même pas ce qu’elle a enduré, ce qu’elle a fait. C’est le mal être d’Adàn qui va en découler, qui la rend malade. Coupable. Les regrets sont sûrement amers et douloureux, mais il est trop tard pour faire marche arrière. Elle ne peut qu’assumer, ou se taire, et visiblement elle opte pour le mutisme. C’est pas très malin face au Misha, après tout, faudra bien qu’elle parle à quelqu’un, ou elle finira par s’étouffer. Il est assez bien placé pour le savoir. S’il n’avait pas ses réunions “aussi inutiles soient-elles" avec sa psy, il ne s’en remettrait pas comme ça, de la taule. Faut pas croire que c’était des vacances et l’hôtel. Il en a subi des choses là-bas, lui aussi. Ses plus grands secrets, peut-être. Le Misha fébrile, inquiet, blessé, il l’a laissé là bas. Et il n’en parle jamais de tout ça, il sait combien ça fait mal de juste y penser.  

Alors il fixe l’horizon, la route, mais le bleu de ses yeux se pose furtivement sur sa voisine, de temps à autre, entre deux ralentissements. Ou sur un feu rouge. Elle l’inquiète Noor. Parce que mine de rien, il y tient à la gosse. Il ne sait même pas trop pourquoi, c’est une Gimenez, ils devraient sûrement se détester, un peu comme les Capulet et l’autre famille, dont il a oublié le nom. Mais Noor elle est comme lui. Aussi brisée, aussi perdue. L’âme recouverte de bleus, de regrets, de peine, et ils font tous les deux ce qu’ils peuvent pour se faire remarquer, alarmer sur leurs états, sans pour autant accepter de l’aide. Bêtement. Trop fiers peut-être. Ou juste trop blessés, tout simplement.  

Et puis il ose la question, Misha. Il a besoin de l’entendre dire peut-être, s’imaginant que ça lui ôtera un poids sur les épaules et la conscience, à elle. Mais finalement, elle n’a qu’une chose en bouche : “ ne dis rien à mon frère. “ Ca en revient toujours à Adàn avec elle, alors qu’elle s’est tirée pour ne plus le voir. Contradiction incompréhensible. Il détourne la tête, frustré, il reprend la route, alors que sa mâchoire se serre. Il voudrait les éviscérer ces types-là. Et pourtant, il ne vaut pas mieux que tous ces gars. Lui il joue avec les filles, qu’il assomme d’alcool ou de mots doux balancés en l’air, qu’il oublie aussitôt. Puis Andy, la pauvre Andy à qui il fait croire monts et merveilles, juste pour emmerder Luke, et s’envoyer en l’air avec une blonde comme bon lui semble. Pauvre fille persuadée de vivre la plus grande idylle de sa vie. Alors qu’elle est juste tombée sur Misha Kane, celui qui ne vaut pas mieux que ces putains de salauds qui s’en sont pris à Noor Gimenez.  

Et puis Noor, elle finit par craquer, ou paniquer. Il ne sait pas trop, mais la main de la jeune femme s’abat sur la sienne, sur le levier de vitesse. Elle prononce son nom, la voix raillée par la fatigue et l’émotion. Heureusement, ils arrivent. Il se concentre sur la route, le temps de garer le véhicule sur le parking du motel. Un peu miteux, mais ça ira pour simplement remettre Noor sur pieds. Il éteint le moteur, puis ses yeux clairs se tournent vers le visage défait de la jeune femme.  

_ “ J’lui dis rien. Mais à condition que tu crache s’qui s’est passé. Tu gagneras rien à tout garder pour toi. J’sais de quoi j’parle. “

Il n’ajoute rien de plus. Il ôta sa main de celle de la brune, puis il sort rapidement de sa voiture. La pluie s’abat sur lui, mais il n’y prête même plus attention. Son seul objectif, c’est s’occuper de Noor. Il claque sa portière et fait le tour pour ouvrir celle de sa passagère. Il la laisse sortir, alors que son visage laisse transparaître des traits serrés et froids. C’est pas contre elle qu’il en a... Evidemment. C’est contre ceux qui lui ont fait ça. Il est en colère, parce qu’il n’a pas pu empêché ça aussi. Il ne l’a pas retrouvé à temps...

_ “ Viens. “

Le son de sa voix est plus doux que ses traits, alors qu’il passa un bras autour des épaules de Noor, bien cachée sous sa capuche. Il l’entraîne vers l’accueil, alors qu’une femme d’une cinquantaine d’année, en gros embonpoint, les accueille d’un râlement. Visiblement, ils la dérangent alors qu’elle ne faisait absolument rien. Misha demande une chambre, et laisse sa carte bleue pour régler au moins quelques nuits. Il sait que Noor en aura besoin, et que lui seul saura qu’elle est là. Il ne s’attarde pas à remercier la nana du comptoir, plus froide qu’une porte de prison. Il tire la gueule, autant qu’elle, alors qu’il empoigne les clés de la chambre 26. Il entraîne Noor vers cette dite chambre. Le motel est comme tous les autres, plusieurs étages, des escaliers et des portes extérieurs. Ils en occupent une du second. Il ouvre la porte alors que la pluie est la seule à briser le silence de la nuit. Il pénètre à l’intérieur, puis tient la porte pour que son amie en fasse de même. C’est simple à l’intérieur. Un lit, deux places. Une petite salle de bain, un meuble de tv, la télévision, et une commode. Il ferme la porte, d’un geste las, avant de scruter Noor de haut en bas. Elle semble sortir des enfers, la gosse.  

_ “ Allez, t’as besoin d’une douche. “

Il la dépasse, il se dirige vers la salle d’eau. Il vérifie l’état de la baignoire, puis il en bouche le syphon pour commencer à faire couler de l’eau chaude dedans. Il en aurait bien besoin lui aussi, à avoir traîné sans pull sous la pluie. Mais il ne s’en rend toujours pas compte, alors que les gouttes ruissellent dans ses cheveux bruns. Il est juste obnubilé par l’état de Noor, un état dont il se sent coupable, alors qu’il n’en n’est rien... La vapeur s’échappe du robinet, l’eau commence à remplir la baignoire.

_ “ Y’a un peignoir j’crois, j’irais te chercher des fringues propres demain matin. “

Il se redresse, puis revient vers la porte de la salle de bain. Il s’y appuie, reposant son regard inquiet sur la silhouette de Noor, encore plantée dans la chambre. Immobile. Probablement en état de choc. S’il pouvait, il préviendrait quelqu’un, mais il sait qu’elle ne lui pardonnerait pas. Alors il s’avance, doucement, cherchant ses clopes dans sa poche. Il en sort sa boite, puis une seule cigarette. Il la coince dans sa bouche, alors qu’il s’arrête face à Noor. Il l’allume, tire dessus, puis la prend entre deux doigts pour la diriger vers Noor.  

_ “ Ca va maintenant, t’es sécur’, okay ? “

Qu’il murmure, tout bas, alors que de sa main libre, il tire légèrement sur la fermeture éclair de sa veste, que porte Noor. Il aimerait peut-être être plus démonstratif avec elle, mais il se doute qu’après ce qu’elle a vécu, c’est pas qu’elle attend.